#hadopi : expliquons aux désemparés : La technologie est un écosystème

Le Parlement Européen encore une fois vient de ventiler façon puzzle le parefeu openoffice de la Ministre de la Culture ! Anéfé, avec 407 voix pour, 57 contre, et 171 abtentions, l’amendement Bono vient d’être revoté, sous sa forme originelle, donc s’imposant aux Etats membres. Bien sûr, évidemment, ce n’est pas fini, ça va repasser au Conseil, on évoque déjà l’entêtement plus que probable du président français et de son gouvernement, prêt à repousser plusieurs mois le Paquet Telecom, une nouvelle fois, juste pour ce seul article mettant l’Hadopi à terre, hors cadre légal européen autorisé…

Il est temps à ce point de la saga Hadopi, de prendre un peu de recul, proposer à ses acharnés partisans des éléments qui leur permettent enfin de comprendre.

– Car, s’il faut rendre grâce à ses têtus producteurs sur un point : cette saga est bien meilleure que la saga DADVSI, les ressorts dramatiques, les trucages et effets spéciaux, les effets de bord, juridiques, européens, médiatiques, d’une intensité et d’un suspense suscitant un débat bien plus large ; on ne peut s’empêcher, en fin de compte, d’être touchés et émus par leur incompréhension si profonde, leur désarroi si ravageur -.

Permettre à ces désemparés de comprendre, c’est à ce travail de fond que s’attelle Fabrice Epelboin, qui continue sur owni le travail entamé sur fr.readwriteweb, publiant aujourd’hui un très bel et long essai d’explication à l’usage de ces élites paniquées, politiques, industriels et artistes arc-boutés sur des positions vouées à l’échec et à la ruine : « La technologie est un écosystème, respectons la » .

wordcloud personnalisé La technologie est un écosystème

Il propose un bilan d’étape, retraçant pourquoi le combat des arguments techniques, juridiques, maintenant largement médiatisé, est perdu pour les tenants de cette loi. Ne reste, dit-il, qu’une rage, j’irais jusqu’à dire une folie se dévorant elle-même dans la défense désespérée, aigrie, de positions qui se croyaient acquises.
« Cette rage, nous dit Epelboin, est liée à deux choses : la peur du changement et l’ignorance de ce à quoi ils font face » : qu’internet, le monde numérique est un écosystème au sein duquel technologies et usages sont intrinsèquement liés, interdépendants, se nourrissant les uns des autres. Que la production, l’échange, l’incessante création modification et recréation contributives d’oeuvres et documents, et leur dissémination libre au sein de cet écosystème, sont un trait constituant de la culture, désormais.
« Sans être encore un moteur essentiel de la culture du XXIe siècle, cette dynamique culturelle est en place, et ne peut s’arrêter d’une façon où d’une autre. Elle peut, au pire, devenir clandestine. Le temps pour elle de tout renverser par une rupture violente dont nos sociétés raffolent. »

Il faut aller au delà des argumentations techniques, des explications simples de tel ou tel point : il faut faire comprendre « LA technologie ». Que c’est un écosystème, que l’on ne peut intervenir dessus sans en respecter les règles : « Si une contrainte est posée dans un écosystème, celui-ci réagit et s’y adapte », pose Epelboin : c’est à peu de nuances près la même chose qu’exprimait John Gilmore, co-fondateur de l’Electronic Frontier Foundation, en 1993 : « L’Internet interprète la censure comme un dommage et la contourne » (« The Net interprets censorship as damage and routes around it »). Ceci est une constante constitutive du net, qu’aucune tentative de contrarier, fût-elle massive et violente, ne parviendra à réduire.
Gilmore commente aujourd’hui sa fameuse formule, dont le sens et la réception ont évolué au fil des années : « Si vous considérez maintenant que le Net est composé non pas seulement de cables et de machines, mais aussi des personnes et des structures sociales qui utilisent ces machines, (cette phrase) est plus vraie que jamais » (« the people and their social structures who use the machines » : on a envie de traduire social structures par réseaux sociaux, mais c’est plus large).

Il faut expliquer cela à Pierre Arditi, à Juliette Gréco (que si Héraclite, qu’ils citent dans leur cri de désarroi, nous enseigne : « le Peuple doit combattre pour ses lois comme pour ses murailles », il nous transmit aussi que « Les hommes éveillés habitent le même monde », ce monde étant ce qu’il est selon son évolution, il nous incombe de rester éveillés, il incombe au peuple d’exercer sa conscience et sa lucidité pour ne pas se tromper de combat, et défendre des lois caduques ou charger contre des moulins à vent),
il faut expliquer à Jean-Claude Carrière (perdu lui aussi, Francis Lalanne et Joseph Paris pourtant lui expliquaient fort clairement hier soir, que « le libre accès à la connaissance et à la culture » est une donnée de fait et un bien de haute nécessité, que « l’oeuvre a une valeur, mais elle n’a pas forcémment la valeur que la société de consommation décide qu’elle a »),
il faut expliquer à Alain Finkelkraut (ébahi de découvrir que des règles existent et sont appliquées dans cet internet qu’il croyait une jungle sans rémission, une poubelle, au point qu’il ne va plus discuter dans les cafés, de crainte qu’on le filme avec un mobile et de retrouver sans pouvoir rien y faire la video sur cet internet poubelle, fou, barbare), il faut leur expliquer tout cela.

On ne combat pas l’océan, on ne combat pas la vitesse de la lumière, on ne parvient pas, armé de sa seule peur et ses crispations, on travaille à créer et aménager les conditions d’une vie bonne, et d’un partage, attentif à ce qui vient : « Coupez l’alimentation en énergie d’une machine, et elle cessera de fonctionner. Coupez le lit d’une rivière, vous observerez quelque chose de radicalement différent. » Peut-être, sûrement, que l’homme est capable d’évoluer, de s’adapter… Comprendre le monde qu’il habite peut l’y aider.

Bonus, suggestion de lecture :
Un roman manifeste cela à plusieurs titres, Le fantôme de l’Internet, par Pangloss : c’est une enquête fantastique à la poursuite du fantôme qui hante l’ordinateur de la ministre de la loi Création sur Internet, le chapitre final s’intitule « tsunami sur Hadopi » ; il est publié sur InLibroVeritas, sous licence de libre diffusion CC by-nc-nd : vous pouvez le découvrir, le copier, le disséminer, le partager en toute liberté.

Des concerts et des concerts, ensemble et tout seul , ici partout et ailleurs…

Allons y joyeusement!

Plusieurs concerts, plusieurs endroits, les membres du collectif Revolution Sound Records prennent la poudre d’ escampette, pour vous dégourdir les oreilles ou vous rallumer les neurones.

Otis et le sac à boulons ensemble !

Le 8 Mai 2009, à Mallemort (13), espace Dany (19h)

L’ humour et la dérision des boulons from Marseille  débarquent dans la ville de Mallemort à l’ occasion de la sortie (on l’espère) officielle de leur maxi et ils investissent, en compagnie du gros son du groupe OTIS la salle de cinéma de l’ espace Dany .
plus d’ infos ici

Le Sac à boulons (tout seul)

Samedi 9 mai :
Café l’Oasis à Brignoles (83)
21h – Gratuit

Samedi 4 Juillet :
Apéro concert
Festival « l’Etang d’Art »
St Chamas (13)

infos ici

Vous pouvez déja soutenir le sac à boulons en pré-commandant leur futur EP ou en faisant un don ici

Trois p’tits Points 

29 mai : Apéro-chanson poésie à la Halle des Chartrons ( place des chartrons, Bordeaux). Du vin et des musiciens dans le très beau cadre de cette halle.
Gratuit !

20 juin : Fête de la musique de Gradignan (33170)  :
Les voici têtes d’affiche de la fête de la musique Gradignanaise.
L’occasion de les écouter dans de (très) bonnes conditions et un chouette cadre !
Toujours gratuit !

7 et 8 juillet : dans le « off » du festival d’art vocal  :
7 juillet : Lège-Cap-Ferret (33950)
8 juillet : Arès (33740)

Plus d’ infos ici ou sur le site des Trois p’tits points (profitez en pour les soutenir en achetant leur dernier album)

Déplacez vous en masse et bon concert !

Vous pouvez écouter, télécharger, soutenir Otis, le sac à boulons et les Trois p’tits points (et beaucoup d’ autres aussi) sur le site du collectif d’ artistes Revolution Sound Records et aussi sur dogmazic.

Hadopi, la « Contribution Créative », et après…

par dana Hilliot (1)

Nous sommes déjà invités à penser dans une perspective post-Hadopi. Je me situe dans ce courant d’analyse qui prévoit que la loi Hadopi sera non seulement quasiment impossible (techniquement et juridiquement) à mettre en œuvre, et j’ajouterais que, même si on appliquait certaines des dispositions prévues, les lobbys qui l’ont inspirée finiront par s’en désintéresser. Il en a été ainsi pour la loi précédente, dite DADSVI, et il n’y a pas de raisons qu’il en aille autrement pour cette nouvelle loi (2). Et je m’en réjouis à l’avance.
Dans cette perspective, seule une proposition alternative semble s’imposer : la licence globale, qu’on appelle aujourd’hui « contribution creative » (3) (qui elle-même se divise en plusieurs versions, universelle, optionnelle, graduelle, etc).
Nous voudrions dans cette brève tribune, de manière certes prématurée puisque les discussions sur Hadopi sont en cours, émettre au sujet de cette fameuse licence globale un avis inquiet, voire franchement négatif. Je précise tout de suite que le champ d’application qui m’intéresse concerne uniquement les œuvres musicales. Des questions se posent également pour la production cinématographique, mais ce champ là échappe à mes compétences.

Mettons toutefois les choses au clair d’emblée. Je suis totalement opposé au projet de loi Hadopi, non pas tant parce qu’il serait en réalité le projet des lobbys de l’industrie du divertissement (ce qu’il est) en vue de sauver ce qui peut l’être de leur business, mais parce qu’il rend possible et légal des techniques de surveillance qui pourraient très bien être détournées de leur usage déclaré (prévenir le téléchargement illégal) : il ouvre en quelque sorte la boîte de Pandore du contrôle accru de la vie privée. J’ajouterai, après bien d’autres critiques, que ce projet Hadopi est fondé sur l’idée tout à fait stupide qu’un téléchargement se substituerait à un achat, chaque œuvre téléchargée représentant ainsi un « manque à gagner » pour les ayants droits – si on empêche le téléchargement illégal, alors les mélomanes ou les cinéphiles iraient se précipiter chez leurs disquaires (enfin : ceux qui restent) ou bien sur les sites de téléchargement payant. Cette croyance est tout à fait délirante, et il est à peine de besoin de produire des études pour le prouver (4)..

Cela dit, l’autre terme apparemment inévitable de l’alternative, la licence globale, ne nous satisfait pas non plus, pour des raisons qui n’ont strictement rien à voir avec les raisons pour lesquelles Hadopi nous semble inacceptable. Je passerai outre les considérations techniques concernant la mise en place d’un tel dispositif (mais tout laisse à penser que ce dispositif ne sera pas moins compliqué de ce point de vue que celui que nécessite Hadopi), et j’essaierai de me concentrer sur les pré-conceptions sur lesquelles repose ce type de projet. À l’issue de mes analyses un peu sauvages, je proposerais toutefois un troisième terme à l’alternative hadopi/contribution créative, terme qui se formule assez simplement par : «laisser faire les artistes et les mélomanes », autrement dit, ne rien faire et observer.

1. Nous avons besoin d’une description plus complexe des mondes de la musique

La licence globale (ou : « contribution créative ») s’appuie (en partie) sur le postulat suivant : « tout artiste a droit à une rémunération pour son travail ». Ce postulat formulé en termes juridiques ne doit cependant pas faire illusion : on serait bien en peine dans le droit de trouver une définition de l’artiste qui puisse justifier une telle formule. Ou alors, si nous devions rédiger un nouvel article du droit d’où l’on pourrait déduire cette articulation entre la vie artistique et sa nécessaire rémunération, il nous faudrait fournir une définition de ce qu’est un artiste, ou du type d’activité qui permet de mériter ce titre, juridiquement parlant. « Ce qu’est un artiste », quelles sont les qualités intrinsèques de ce genre d’être humain, ou quels seraient les critères permettant d’identifier juridiquement une activité artistique, voilà qui est affaire de fantasme, d’opinion, ou, au mieux, de philosophie. Vers où se tourner pour produire une définition objective, ce qui serait tout de même le premier acte d’une institution du droit ? Nous ne disposons pas jusqu’à preuve du contraire d’une définition suffisamment consensuelle pour qu’un projet de loi visant à sauver les artistes fasse l’unanimité ou bien soit simplement crédible.

Il y a tout lieu de craindre que la licence globale se satisfasse d’une situation de fait en guise de définition de droit : pour le dire concrètement, et vu comment les choses s’explicitent autour de cette licence, il y a fort à parier que, de fait, seuls les auteurs inscrits à la Sacem seront tenus pour les bénéficiaires légitimes du dit droit (5). Les projets autour de la licence globale considèrent que la Sacem devrait être « naturellement » l’organisme chargé de répartir aux artistes les sommes récoltées au titre de la licence globale. Et ce pour au moins deux raisons, que je voudrais d’abord exposer puis critiquer.

Indiscutable Sacem ?

L’une est assez prosaïque : la Sacem gère les œuvres des auteurs et des ayants droits qui ont souhaité être rétribués en échange de la jouissance que les mélomanes tireraient de l’écoute ou de l’utilisation de leurs œuvres. Comme elle est le seul organisme en France chargé de cette mission -redistribuer les droits afférents à la consommation des œuvres – il paraît logique de lui confier la tâche de redistribuer les sommes récoltées par la licence globale. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si :
1° tous les auteurs de ce pays étaient inscrits à la Sacem (nous savons que c’est loin d’être le cas) et
2° si, au sein même des membres inscrits, la répartition des droits afférents à la jouissance des œuvres s’opérait de manière indiscutable, c’est-à-dire, juste.
Or, à moins d’être tout à fait ignorant des débats ayant cours autour des rémunérations des auteurs, on ne peut manquer de relever le fait que justement, cette répartition fait débat, et que ça ne date pas d’aujourd’hui. J’ai envie de dire, puisque je ne suis pas membre de la Sacem, qu’à la limite, ces problèmes ne concernent que les membres de cette association. Si la Sacem devait être effectivement chargée de gérer la répartition des sommes récoltées par la licence globale, alors il suffirait de régler les problèmes en interne, et, à la limite, cela ne concernerait pas vraiment l’État ou les citoyens. Sauf que :
1° la Sacem étant en situation de monopole, et ce, avec l’aval bienveillant du droit, il y a là tout de même une question qui devrait interpeller de temps à autres le politique et
2° il existe des milliers d’auteurs qui ne sont pas membres de la Sacem, ce qui me conduit au point suivant.

Des auteurs irrationnels

L’autre raison relève d’une pré-conception discutable de la réalité de la création dans ce pays : cette pré-conception part du principe que les auteurs inscrits au catalogue de la Sacem sont suffisamment représentatifs du monde de la création réel, le reste, les artistes non membres, comptant pour trop peu pour qu’il soit légitime d’en faire cas, ou bien, dans une version plus caricaturale, qu’il n’y a d’auteurs digne de ce nom que ceux qui sont membres de cette vénérable institution. On retrouve ici un mythe contemporain que j’ai essayé de mettre à jour après d’autres dans mon texte Amateurs versus professionnels (6), celui selon lequel un artiste ne mérite ce nom qu’à exercer son art professionnellement, ou en vue d’en faire profession, mythe autour duquel gravite toute une pénombre d’associations du type : l’amateur est un dilettante, et ses œuvres ne peuvent au mieux qu’attirer la sympathie, tandis que le professionnel fait un travail sérieux, ce qui est le gage de la qualité de son œuvre. Sans parler des sophismes du type : « Tout travail mérite salaire », or, « l’activité artistique est un travail », donc, « l’activité artistique doit être rémunérée » etc.. bref, derrière cette édification de la Sacem comme représentant et porte-parole des « véritables » auteurs, ceux qu’il convient de prendre en compte politiquement, on peut aisément repérer tout une sérielle de fantasmes, de formules très peu rationnelles. Et surtout : ces fantasmes procèdent d’une vision tout à fait étriquée de la réalité. J’en profite d’ailleurs pour réitérer là un appel à des études sociologiques sérieuses, capables d’aller mener des enquêtes au-delà des informations fournies par les institutions et les chiffres du marché (internet fournit aisément si on veut s’en donner la peine, un tableau beaucoup plus complexe de la réalité du champ de la musique que ce qu’en dessine les statistiques de l’IRMA ou des bisnessmen). En réalité donc, il existe des milliers d’auteurs qui, pour différentes raisons, ne sont pas membres de la Sacem. Certains bénéficient d’une notoriété d’ailleurs bien plus grande que nombre d’adhérents de la Sacem, et ont produit une œuvre bien plus considérable. Parmi ces auteurs dont les œuvres n’apparaissent pas dans le catalogue de la Sacem, certains attendent peut-être une notoriété plus importante, considérant que pour le moment ça ne vaut pas la peine de rejoindre un organisme de gestion collective, vu le peu de droits que l’exploitation de leur œuvre engendrerait. Beaucoup d’autres sont dans une perspective tout à fait différente : ils considèrent que leur musique devrait circuler librement, sans trop d’empêchement, et préfèrent autoriser et encourager par contrat (les fameuses licences de libre diffusion) les mélomanes à écouter, à échanger, à faire circuler, à jouer, voire à réutiliser et modifier, leurs œuvres. Du coup, ce sont des œuvres que la Sacem ne gère pas, sur lesquelles elle n’a aucun contrôle (et de fait ces auteurs ne souhaitent certainement pas un tel contrôle). Ce genre de choix paraît tout à fait incompréhensible aux yeux de celui qui tient au mythe que nous avons décrit ci-dessus. Ce dernier pense alors comme certains économistes qui ne comprennent les comportements humains qu’à l’aune du modèle de l’individu calculant ses intérêts (financiers). Le problème, pour le tenant du mythe, c’est que ces comportements qui lui semblent tout à fait irrationnels sont « de fait » des comportements observables dans la réalité.
On peut effectivement les ignorer, ces auteurs qui se comportent de manière irrationnelle (ils ont leurs raisons, bien évidemment), mais alors on devra admettre que le droit, la loi, repose sur une vision délibérément étriquée de la réalité, qu’elle n’est pas la loi pour tous mais pour quelques uns.
À la limite, on pourrait dire : mais que leur importe à ces auteurs, qui ont fait le choix de ne pas réclamer de droits d’auteur (à part dans quelques cas exceptionnels, éventuellement inscrits dans des clauses), cette licence globale ? L’argent récolté ira à ceux qui émis le réclament, et voilà tout.
sauf que, sauf que..

payer pour jouir

Il est probable que tout abonné à internet par le biais d’un fournisseur d’accès devra verser son obole à la licence globale (7). Y compris donc les auteurs qui publient sous licence de libre diffusion et les mélomanes qui les écoutent. Or, on se retrouve dans un cas de figure paradoxal, puisque, non content de sacrifier leurs rémunérations dues à la circulation des œuvres afin de favoriser le libre accès à la culture pour le plus grand nombre (ce qui me paraît quelque part constituer un but politiquement louable), ils devront en plus financer, par le biais de cette redevance, les auteurs qui eux désirent au contraire qu’on paye pour jouir de leurs œuvres . Sachant que, vu la manière dont les sommes récoltées par la Sacem sont réparties, il y a de fortes chances que ce soit encore les mêmes qui récoltent le pactole (le système de la répartition de la Sacem aboutissant en fait à un renforcement des inégalités, le plus riche touchant forcément plus que les autres). Et, cerise sur le gâteau : cette situation ubuesque existe déjà, puisque depuis la loi Tasca, chaque fois que nous achetons un support de reproduction vierge ou un outil de stockage, nous versons notre dîme à ces mêmes auteurs, par le biais de la redevance sur la copie privée (8).

Hé bien, nous auteurs non membres de la Sacem, nous sommes nombreux à considérer que la coupe est pleine. Je suis tout à fait compréhensif au sujet des auteurs qui ont choisi de défendre leur droit à une rémunération, je suis tout à fait conscient que l’industrie du divertissement craint pour la pérennité de ses revenus traditionnels (9), et je pense que l’État peut avoir son mot à dire à ce sujet. Mais, je crois qu’il faut arrêter de fabriquer des lois et des taxes pour défendre une industrie avant tout occupée à créer du profit, dont bien peu revient en définitive aux artistes (à part aux déjà mieux lotis), industrie dont il y a fort à parier qu’elle finira bon an mal an par se tourner vers des activités plus rémunératrices que la culture. Je crois qu’il faut arrêter de confier systématiquement à la Sacem le rôle de représentant des auteurs et des musiciens, et admettre qu’elle ne représente que ses membres, et que parmi ses membres, seuls une minorité bénéficient réellement des sommes qu’elle est censée gérer. Je crois qu’il faut que le législateur, s’il souhaite vraiment légiférer, tienne compte de la complexité croissante des pratiques en matière de musique, et s’enquiert plus précisément de cette complexité, et cesse de traiter par le mépris les portes paroles des auteurs qui se comportent autrement qu’on voudrait que les auteurs se comportent dans un monde plus simple.

2. Il vaut parfois mieux laisser faire plutôt que d’apporter une mauvaise réponse à une question mal posée

À la question de la supposée perte de rémunération des auteurs (et j’aimerais vraiment une enquête sérieuse à ce sujet, plutôt qu’un espèce d’opinion vague indigne d’une conscience politique responsable) et aux moyens d’y remédier, je n’ai aucune réponse. Ce n’est pas à nous, auteurs qui avons choisi de publier sous licence de libre diffusion, de nous enquérir des moyens de sauver les rémunérations des auteurs et les bénéfices de l’industrie du divertissement et de leurs actionnaires. Nous demandons simplement qu’on nous laisse travailler en paix, explorer nos propres modèles de production et de diffusion, qui, je n »ai aucun doute là dessus, constitueront dans l’avenir la voie privilégiée de la pratique artistique mondaine. Nous ne voulons pas payer pour soutenir des modèles en ruines, auxquels nous ne croyons plus, à tort ou à raison.

Sauver le business de la musique : A never ending story ?

Et, tout de même : jusqu’où ira-t-on ? La taxe sur la copie privée n’a pas suffit, la loi Dadsvi n’a pas suffi (et n’a même pas été appliquée), la loi Hadopi ne procurera aucun revenu supplémentaire aux auteurs qui la soutiennent, et constitue de surcroît une menace pour la sphère privée, la licence gobale ne rapportera au bout du compte qu’à ceux qui ont déjà suffisamment voire beaucoup. Et dans deux ans, quelle loi ou quelle taxe inventera-t-on pour conserver des modèles de rémunération (payer pour jouir d’une œuvre) qui sont de toutes façons voués à disparaître ? Certes, le secteur de la culture et du divertissement n’est pas le seul qui bénéficie de politique de soutien public spécifique. Par exemple, une bonne partie de l’agriculture, dans les pays industrialisés, dépend de manière vitale des aides publiques. Différents secteurs de l’industrie ont subi dans le contexte de la mondialisation des échanges, et avec la croissance des effets du capitalisme financier, des effondrements que le puissance publique a pu freiner, retarder, mais qu’elle n’a toujours pu ou su empêcher. Mais dans le cas de l’industrie du divertissement et/ou de la culture, l’engagement de l’État ne saurait s’appuyer sur des considérations aussi vaseuses que « Il faut sauver la création », « Les artistes se meurent » et autres formules hystérisantes : la vérité est que le système de la musique tel qu’il s’est développé depuis les années 80, avec la constitution des majors, l’invention des droits voisins, le déploiement de l’internet, la facilité d’accès aux moyens de diffusion pour n’importe quel créateur, etc… la vérité est que ce monde (ou plutôt ces mondes qui souvent se juxtaposent plutôt qu’ils ne se lient), a gagné en complexité, et que repérer où est l’artiste qu’on voudrait sauver là dedans, hé bien, ça demande une réflexion plus fine, une recherche poussée, des enquêtes approfondies. Une telle enquête montrerait probablement que l’immense majorité des auteurs et des créateurs de ce pays survivent en se comportant exactement comme la plupart des gens : c’est-à-dire qu’ils exercent un métier, ou bien dépendent d’aides sociales ou familiales. Et que seule une minorité capte réellement grâce à la commercialisation de leurs œuvres un revenu complet (et parmi ceux là, quelques uns récupèrent des sommes tout à fait considérables, et il y a de quoi hurler à les entendre se plaindre des internautes qui les spolient). L’économie de la musique produit donc des inégalités tout à fait considérables, phénomène qui s’est notablement aggravé depuis la constitution des majors et l’invention des droits voisins dans les années 80. Il est entendu qu’Hadopi ne changera rien à l’affaire, puisque cette loi coûtera bien plus d’argent qu’elle n’en rapporte. Je voudrais dire ici au futur législateur qui sera amené à réfléchir à une contribution créative ou une licence globale, que ces derniers artifices risquent fort non seulement de ne rien changer à ce système producteur d’inégalités, mais pire encore, de l’aggraver. Déjà, ne devrait-on pas commencer par soumettre à l’examen les effets réels sur l’économie de la musique de la redevance sur la copie privée ? Se demander à qui profite cette manne ? Combien d’artistes non seulement n’ont jamais vu un penny leur parvenir au titre de cette redevance, et qui, au contraire, payent la redevance pour financer des artistes qui eux sont déjà bien installés dans le système de rémunération actuel ? Pourquoi en irait-il autrement avec la contribution créative ? Ces différentes taxes publiques sont destinées avant tout à sauver des auteurs, des producteurs, des industries, qui ont, pour des raisons diverses, su tirer leur épingle du jeu dans une économie autrefois florissante. Dans cette affaire, la puissance publique se contente de consolider ou de sauvegarder ce que le marché de la musique a consacré. Elle n’apportera rien à ceux qui n’avaient déjà rien – lesquels d’ailleurs ne réclament en général pas grand chose, sinon qu’on reconnaisse leur existence. Le fait est que ça ne les empêche pas, ces auteurs qui se débrouillent avec peu de revenus directement liés à la commercialisation de leur musique, de composer, d’enregistrer et de diffuser. Financièrement, ils font autrement, voilà tout (c’est le cas dans tous les pays du monde). On peut, au nom d’une certaine conception de ce que devrait être un artiste et les privilèges qu’il devrait avoir compte-tenu de la « valeur » de sa production, considérer cette situation comme injuste. Si vous voulez (je ne suis pas sûr que tous ces artistes s’en plaignent d’ailleurs). Mais on devrait surtout, avant d’élaborer une loi pour « sauver la création », s’enquérir de ce monde-là, examiner comment ils se débrouillent, et au minimum l’admettre à titre de fait, plutôt que de balayer cette part de la réalité d’un revers de la main et se contenter de réagir aux malheurs supposés des artistes les plus médiatiques, ceux qui, au sein d’un certain système, ont réussi.

Dire la vérité et appeler un chat un chat.

Je serais bien incapable à ce moment de mon exposé de proposer une autre solution. Pour la simple et bonne raison que le problème qui se pose au législateur me paraît pour le moins opaque. S’il s’agit simplement de sauver un système et une industrie soi-disant en péril, et que la licence globale constitue une réponse à ce problème, hé bien, pourquoi pas ? Mais il faut le dire explicitement ainsi. Mais s’il s’agit de soutenir « la création », ou « les artistes », et qu’on entend par là l’ensemble des artistes et des créateurs, en tenant compte de la diversité de leurs aspirations et de leurs pratiques, alors la licence globale n’est en rien la réponse appropriée. Ou alors elle n’est qu’une réponse pathétiquement partielle (puisqu’au bout du compte elle se contentera de consolider les positions de ceux qui ont déjà sorti leur épingle du jeu, en ignorant tous les autres). Si on concédait qu’après tout, l’État est dans son droit, si les représentants élus le jugent bon, de s’évertuer à sauver un mort en sursis, et qu’après tout les redevances sur la copie privée ou les abonnements internet, sont voués à n’être que des mesures transitoires, destinées donc à accompagner une transition douloureuse vers autre chose (quelque chose qu’on est bien en peine d’imaginer), hé bien : admettons-le, et tant pis pour les euros que tout un chacun devra verser à ce compte. Mais qu’on le dise ainsi ; qu’on n’aille pas emberlificoter les citoyens en leur racontant des sornettes afin de se donner bonne conscience (ou de satisfaire les desirata de quelques puissants amis). On aimerait en tous cas que la vérité qui manquait cruellement dans les « arguments » (j’ose à peine leur donner ce nom) des défenseurs de l’Hadopi, ne subisse pas le même sort lorsque les défenseurs de la licence globale monteront au créneau.

Tout de même, et là je m’adresse à ceux qui soutiennent le projet d’une contribution créative ou d’une licence globale, réfléchissez-y à  deux fois avant de confier cette nouvelle manne à tel ou tel organisme chargé de la redistribuer. La Sacem, contre laquelle je n’ai aucun grief, étant moi-même en tant que musicien tout à fait indépendant de cet organisme, ne prend soin que de ses membres. Confier cette manne à la Sacem, c’est considérer que tous les auteurs en sont membres, ce qui est totalement faux. Et je conseillerais alors au futur législateur de se demander pourquoi tant d’auteurs ne s’inscrivent pas à la Sacem.

On évoque la création d’un autre organisme « indépendant », une autorité qui, aux côtés de la Sacem, serait chargée de redistribuer les sommes récoltées aux ayants droits non inscrits dans une société de gestion collective. Mais là encore, quelles seront les règles de la répartition ? Il y a là un problème sérieux qui se pose : si on considère que la licence globale s’inscrit elle aussi dans la lignée des redevances visant à compenser les pertes (supposées) de la vente de supports matériels, existe-t-il une règle de répartition juste, équitable, rationnelle ? Dans la logique de la « compensation » de pertes supposés, il me semble que la seule règle objectivable consiste à redistribuer aux auteurs proportionnellement aux téléchargements observés. Mais si l’on procède de la sorte, la licence globale ne fera comme je l’ai dit que récompenser les artistes consacrés par le marché (en premier lieu, les artistes sont la télévision et la radio nous assomment, ou ceux qui ont les moyens d’être promus par la publicité, bref ceux qui saturent déjà l’espace musical publique). Est-ce là un but politique avouable ? Je laisse au législateur le soin de l’évaluer. Et combien de temps allons-nous compenser les pertes supposées suite à la disparition probable des supports matériels de diffusion ? Deux ans ? Dix ans ? Vingt ans ? Mais à cette époque, ces fameux supports ne seront que de lointains souvenirs. Si on abandonne la logique de la compensation, en considérant par exemple que de toutes façons, la vente de supports physiques est déjà de l’histoire ancienne, et qu’il n’y a plus rien à compenser du tout, alors comment justifier une telle loi ? Ce serait là une imposition directe ? Mais dans quel but ? Soutenir la création ? Mais à partir de quand décide-t-on qu’on a affaire à un créateur ? ou à un « artiste » ? Et pourquoi se limiter à la musique ? Quel principe politique digne de ce nom réserverait une imposition en faveur des seuls musiciens ? ce serait là à mon sens une révolution pour la culture comparable à l’invention du droit d’auteur au XVIIIème siècle ! Et n’est-ce pas dans ce cas absurde que seuls les internautes soient invités à verser leur obole ? Et quid de la répartition de cette somme ? Je crois qu’il faut faire extrêmement attention quand on envisage de créer un nouvel impôt en faveur d’une catégorie de la population. Cela demande en tous cas une profondeur de réflexion politique dont on ne voit pas pour le moment la moindre ébauche. On entend mult belles phrases et beaux sentiments, mais on peut espérer qu’une modification aussi spectaculaire du droit se fonde sur des arguments, et pas de bons sentiments.

Et si nous laissions faire les artistes ?

Soutenant ce leitmotiv de la compensation, il y a des idées qui trainent, évidemment jamais problématisées en tant que telles : « Un État se doit de soutenir la création » (oui : mais à quel prix ? Et qu’appelons-nous « création » ?), « La manière dont les choses de la musique fonctionnait était préférable avant internet » (alors je m’étonne qu’un de nos législateurs zélés ait omis de proposer qu’on interdise purement et simplement l’accès à internet au profit de la création), et plus fondamentalement, « la musique enregistrée ne peut considérée que comme une marchandise » (et de fait, l’auteur et les artistes sont des entrepreneurs etc.). Je crois que le temps viendra où nous devrons définitivement nous débarrasser de telles idées. Et à vrai dire, je me situe personnellement, et beaucoup d’artistes sont dans ce cas, dans une perspective non seulement post-hadopi, mais post-licence globale. Le législateur tend à se représenter internet comme un chaos : mais c’est faire fi des mécanismes d’auto-régulation qui ont toujours émergé de ce chaos. C’est un fait que de nombreux artistes n’ont pas attendu que le législateur se penche sur leur cas pour inventer et élaborer des solutions pratiques qui leur permettent de continuer à produire de la musique et la diffuser. J’ai parlé de ces artistes qui adoptent délibérément une attitude de confiance envers les mélomanes, en les encourageant à partager leurs œuvres. Chaque semaine nous vient aux oreilles que tel ou tel artiste reconnu s’est émancipé de sa maison de disque pour voler de ses propres ailes. La plupart de ces innovateurs savent tirer de l’outil internet un avantage plutôt qu’un inconvénient. Beaucoup font appel aux dons (et quand est-ce que dans ce pays, un gouvernement aura l’audace de fabriquer une loi véritablement incitative pour le mécénat et le don pour les projets culturels ?). Un nombre croissant d’artistes acquiert une reconnaissance (voire un véritable succès) sans passer par les intermédiaires traditionnels, mais en communiquant sur internet et en se produisant sur scène. Quelle que soit leur notoriété et leur succès commercial, une foule d’artistes est en train d’inventer le futur de la musique (10). Pourquoi ne pas tout simplement les laisser faire ? Et tant pis pour ceux qui ne jurent que par la conservation de leurs privilèges d’autrefois. N’y-t-il pas quelque chose d’indécent que « ceux qui ont eu leur heure » inspirent aujourd’hui des lois fondées sur le soupçon envers les mélomanes ?

…………….

(1) Ce texte a été écrit sans trop de soin. Le développer m’engagerait trop loin, et je n’ai pas suffisamment de temps à consacrer à cette tâche. Vous trouverez d’autres textes autour de ces problématiques sur cette page web : http://www.outsiderland.com/danahilliot/dana_writings/writings.htm. Évidemment, je ne parle pas tout à fait de n’importe où, et je dois être honnête envers mes éventuels lecteurs en concédant quelques informations à ce sujet : j’ai fondé en 2002 un des premiers labels indépendants (de taille fort modeste certes, mais qui a connu depuis un développement régulier) publiant de la musique sous licence de libre diffusion. Il va de soi que je milite pour ces licences depuis cette époque, notamment au sein de l’association musique-libre.org (aujourd’hui : Dogmazic). Je suis également musicien (mais sans grande notoriété, et à vrai dire, de plus en plus discret, par goût et par confort). Et je gagne ma vie en exerçant (depuis quelques années) un autre métier qui est aussi un passion.

(2) Je réitère à ce sujet une exaspération que j’ai déjà exprimée ailleurs : le pire pour une démocratie, c’est d’assister à ce dévoiement du droit, que les lobbys parviennent à faire modifier sans vergogne au gré de leur lubies. Le droit d’auteur constitue depuis les années 80 et l’adoption des droits voisins un champ d’expérimentation pour les intérêts des industriels du divertissement, un outil pour capter à peu de frais de l’argent public avec l’aval des gouvernements de droite ou de gauche. Il est devenu au fil de ces dernières décennies un fourre tout anarchique qui se modifie et se gonfle d’alinéas délirants : si Diderot était encore de ce monde, il serait sans doute effaré de voir comment la philosophie et les principes qui présidaient à l’invention du droit des auteurs en France ont été mis en ruines par les businessmen.

(3) voir à ce sujet les remarquables réflexion de Philippe Aigrain dans son livre Internet et Création : http://paigrain.debatpublic.net/?page_id=171. Les propositions de P. Aigrain à partir desquelles les politiques fabriqueront sans doute le projet de « contribution créative » sont fondées sur des analyses fines et complexes. Ma crainte tient au fait que ces considérations, dès lors qu’elle se produiront dans le champ du débat politique, seront probablement passées sous silence au profit des simplifications rhétoriques en usage dès qu’une question portant sur les arts et la culture fait l’objet d’un débat public. Cela dit, même dans la perspective proposée par P. Aigrain, je ne crois pas que le modèle de la rémunération qui s’y dessine soit un modèle pour l’avenir. Le fond de ma pensée, concernant l’avenir de la culture, est qu’il vaudrait mieux laisser les choses se faire : les auteurs sur Internet et ailleurs fabriquent chaque jour des mesures d’autorégulation, élaborent des bricolages, inventent des solutions juridiquement compatibles, etc. Faisons leur confiance : la plupart sauront d’adapter et faire preuve d’imagination ou suivront des modèles créés par d’autres afin de résoudre leurs problèmes et réaliser leurs désirs. Certes, on entend aujourd’hui la plainte tonitruante de ceux qui, parmi les artistes, préféreraient que les choses reviennent à un état antérieur, souhaiteraient conserver leurs privilèges. Cette attitude est récurrente à chaque fois qu’un système est en crise. Devons-nous élaborer des politiques en fonction de ces plaignants, ou devons-nous faire confiance à ceux qui innovent et inventent ? C’est au fond la question qui se pose en ce moment de crise.

(4) Je vous renvoie toutefois au texte décapant de Fabrice Epelboi : http://fr.readwriteweb.com/2008/11/18/a-la-une/rapport-hadopi/

(5) Évidemment, il y a fort à parier qu’une telle manne suscite également l’intérêt des interprètes et des producteurs. Ce qui ne simplifiera pas les choses (rien qu’au sujet de la répartition).

(6) Dana Hilliot : Professionnels versus Amateurs : http://www.outsiderland.com/danahilliot/dana_writings/professionnelsversusamateurs.htm

(7) Il semblerait cependant que certaines versions du projet prévoient la possibilité pour l’internaute d’adhérer de manière optionnelle à ce système de paiement compensatoire. Je me demande alors comment gérer la situation de tous ceux qui « oublieront » de payer mais n’en continueront pas moins à télécharger : faudra-t-il adjoindre à ce système « optionnel » un système répressif « optionnel » du type Hadopi ?

(8) Nous espérons au moins que le législateur aura alors la décence de supprimer la redevance sur la copie privée. Sinon il y a fort à parier que les mélomanes finissent par se rendre compte qu’ils sont les vaches à lait d’un système en voie d’obsolescence, et il se pourrait bien qu’ils se rebellent un peu.

(9) Je suis toutefois persuadé que les majors ont déjà trouvé d’autres sources de financement, plus rentables que la production musicale. Ceux qui risquent fort de disparaître dans l’histoire sont les maisons de disques dites “indépendantes” (indépendantes de quoi ? Des majors ?) de taille moyenne. Vu le nombre extraordinaire de micro-structures et de petits labels florissant depuis une dizaine d’années, je suis désolé de dire que la relève est déjà largement assurée. Certes, c’est aussi toute une chaîne compliquée de petits et grands métiers, d’intermédiaires, de médiateurs, de promoteurs, d’agents en tous genre, qui risque fort de disparaître. C’est toujours triste de devoir changer de métier quand la demande concernant son activité diminue. Mais bon, il y a des tas de gens qui sont dans ce cas, et je ne vois pas pourquoi, parce qu’il s’agit de “culture” (mot dont l’usage paraît quelque peu galvaudé quand on songe à certaines productions promues par les chaînes de télévision), on devrait éprouver à leur sujet plus de préoccupation et d’émotion que lorsqu’il s’agit de travailleurs dans des secteurs non-culturels.

(10) Un sociologue attaché à une méthode qualitative aurait sans doute des informations intéressantes à tirer de la manière dont les mouvements inspirés des premières licences libres ont évolué ces dix dernières années. À la fin des années 90, les initiatives liées aux licences libres reposaient sur des discours à teneur fortement idéologique,  et explicitement dirigés contre le système de la musique commercial. Dix années plus tard, on constate que les réalisations concrètes (labels, plate-forme de diffusion, associations en tous genre, et bien sûr, des milliers de projets artistiques) qui utilisent ces licences se sont totalement émancipées intellectuellement des catégories et modes de pensée du système ancien. C’est par les pratiques et les réalisations qu’au bout du compte le mouvement s’est libéré de ses crispations anti-culturelles pour constituer une véritable alternative. Internet a favorisé, en tant qu’outil, cette émancipation, parce que le champ du web était laissé quasiment libre par les industries culturelles. Le risque aujourd’hui, pour les alternatives, seraient que les industries et les businessmen parviennent à récupérer le contrôle non seulement réel mais idéologique de cet outil. La loi Hadopi constitue un exemple flagrant de ce type de tentative. Effectivement, il leur faut la loi et la puissance publique pour parvenir à leurs fins. C’est pourquoi je crois tout à fait vital que le législateur futur daigne enfin se pencher sur les alternatives sans sombrer dans l’erreur de ne les considérer que comme des positions contre-culturelles. Il s’agit bien de constater le pluralisme des pratiques, des idées et des valeurs, plutôt que d’en revenir à des oppositions idéologiques totalement dépassées aujourd’hui.

[#libertés ; #hadopi ] Qui contrôlera le futur ?

J’ai mis 2 hashtags dans le titre, et #libertés devant #hadopi : il y a le fond, et l’occasion : lisez ce texte-manifeste du peuple de la science-fiction d’une lucidité enviable :

« Nous, le peuple de la science-fiction, auteurs, traducteurs, illustrateurs, critiques et chroniqueurs, essayistes, libraires, blogueurs, éditeurs et directeurs de collection, tenons à exprimer par ce texte notre opposition à la loi Création et Internet.

C’est un truisme de dire que la science-fiction se préoccupe de l’avenir et que nombre de ses acteurs ont dénoncé les dérives possibles, voire probables, des sociétés industrielles et technologiques ; le nom de George Orwell vient spontanément aux lèvres, mais aussi ceux de John Brunner, Norman Spinrad, Michel Jeury, J.-G. Ballard, Frederik Pohl & Cyril M. Kornbluth, et bien d’autres encore.

La science-fiction sait déceler les germes de ces dérives dans le présent, car c’est bien du présent que rayonnent les avenirs possibles, et c’est au présent que se décide chaque jour le monde de demain.

La méfiance face aux nouveaux développements technologiques et aux changements sociaux qui en résultent, la peur de l’avenir et le désir de contrôle d’une société obnubilée par un discours sécuritaire… tout cela a déjà été abordé par la science-fiction, et s’il est une chose dont elle a permis de prendre conscience, c’est que les technosciences et leurs développements sont la principale cause de changement dans nos sociétés modernes. De ces changements en cours ou en germe, nul ne peut prévoir les retombées mais on sait aussi qu’élever des barrières ou des murs n’amène qu’à les voir tomber un jour, de manière plus ou moins brutale. Aussi, plutôt qu’interdire, la sagesse, mais aussi le réalisme, devrait inciter à laisser libre cours à la liberté d’innover et de créer. Le futur qu’il nous faut inventer chaque jour ne doit pas être basé sur la peur, mais sur le partage et le respect.

La loi Création et Internet, rejetée le 9 avril dernier à l’Assemblée nationale, doit être de nouveau soumise à la fin du mois à la représentation nationale.

Cette loi, dont on nous affirme qu’elle défendra les droits des artistes et le droit d’auteur en général, nous apparaît surtout comme un cheval de Troie employé pour tenter d’établir un contrôle d’Internet, constituant par là même une menace pour la liberté d’expression dans notre pays.

Les artistes, les créateurs, tous ces acteurs de la culture sans qui ce mot serait vide de sens, se retrouvent instrumentalisés au profit d’une loi qui, rappelons-le, contient des mesures telles que le filtrage du Net, l’installation de mouchards sur les ordinateurs des particuliers, la suspension de l’abonnement à Internet sans intervention d’un juge et sur la base de relevés d’IP (dont le manque de fiabilité a depuis longtemps été démontré) effectués par des sociétés privées et l’extension de mesures prévues à l’origine pour les services de police luttant contre le terrorisme à l’échange non autorisé de fichiers entre particuliers.

Profondément attachés au droit d’auteur, qui représente l’unique ou la principale source de revenus pour nombre des travailleurs intellectuels précaires que nous comptons dans nos rangs, nous nous élevons contre ceux qui le brandissent à tout bout de champ pour justifier des mesures de toute façon techniquement inapplicables, certainement dangereuses, dont le potentiel d’atteinte aux libertés n’est que trop évident aux yeux de ceux qui, comme nous, pratiquent quotidiennement dans le cadre de leur travail l’expérience de pensée scientifique, politique et sociale qui est au cœur de la science-fiction.

Également conscients de l’intérêt et de la valeur des communautés créatives, nous nous élevons aussi contre les dangers que cette loi fait peser sur le monde de la culture diffusée et partagée sous licence libre, qui constitue une richesse accessible à tous.

Internet n’est pas le chaos, mais une œuvre collective, où aucun acteur ne peut exiger une position privilégiée, et c’est une aberration de légiférer sur des pratiques nées de la technologie du XXIe siècle en se basant sur des schémas issus du XIXe siècle, songez-y.

Car l’avenir est notre métier.

Joseph Altairac, essayiste
Jean-Pierre Andrevon, auteur, critique, essayiste
Ayerdhal, auteur
Stéphane Beauverger, auteur
Ugo Bellagamba, auteur, essayiste
Jean-Luc Blary, éditeur
Pierre Bordage, auteur, scénariste
Georges Bormand, auteur, critique
David Calvo, auteur
Philippe Caza, illustrateur, scénariste
Hélène Collon, traductrice
Thomas Day, auteur, directeur de collection
Jeanne A. Debats, auteur
Irène Delse, auteur
Sylvie Denis, auteur, traductrice, anthologiste, essayiste, critique
Sara Doke, auteur, traductrice, essayiste
René-Marc Dolhen, critique
Jean-Claude Dunyach, auteur, anthologiste
Claude Ecken, auteur, critique, essayiste, scénariste (BD)
Jean-Pierre Fontana, auteur
Gilles Francescano, illustrateur
Thomas Geha, auteur, libraire
Laurent Genefort, auteur, essayiste, directeur de collection
Laurent Gidon, auteur
Olivier Girard, éditeur, rédacteur en chef
Karine Gobled, blogueuse
Julien Guerry, libraire
Vladimir Harkonnen, baron
Jean-Christophe Hoël, illustrateur
Aurélien Knockaert, webmestre
Sylvie Lainé, auteur
Patrice Lajoye, anthologiste
Nathalie Legendre, auteur
Roland Lehoucq, essayiste
Jonas Lenn, auteur
Jean-Marc Ligny, auteur
Laurent Million, auteur
Yann Minh, illustrateur, créateur de liens
Michel Pagel, auteur, traducteur
Olivier Paquet, auteur
Audrey Petit, directrice de collection
Jean-Pierre Planque, auteur
Laurent Queyssi, auteur
Simon Sanahujas, auteur, essayiste
Nicolas Soffray, auteur, critique
Hervé Thiellement, auteur, critique
Christian Vilà, auteur, essayiste
Jérôme Vincent, éditeur, webmestre
Roland C. Wagner, auteur, traducteur, essayiste, critique
Philippe Ward, auteur, directeur de collection

publication originale : http://generationscience-fiction.hautetfort.com/archive/2009/04/25/qui-controlera-le-futur.html

LE 1ER MAI : TOUS CONTRE HADOPI ! DÉFILONS AU SON DE LA MUSIQUE LIBRE !

Au moment même où le Parlement Européen donne des signes forts, à quatre reprises, indiquant que la coupure de l’accès Internet est une sanction grave, qui ne pourrait donc être prononcée que par un juge, la France décide de bafouer le droit élémentaire à un procès équitable en en faisant une sanction administrative.

Cette prise de position, au mépris de toutes les institutions démocratiques, indique que dans l’esprit de nos dirigeants, couper l’accès à Internet, c’est comme de priver un enfant de télévision, ça n’est pas grave. Au prétexte de protéger les maisons de disques contre les téléchargements gratuits, si cette loi était mise en application, les nouvelles milices privées du net auraient le pouvoir de couper une connexion internet, à titre punitif, trois mois ou un an.

Au prétexte de protéger le modèle économique dépassé des moines copistes de DVD de l’industrie du cinéma et de la musique, pour défendre les amis du Fouquet’s, la France s’apprête à brader l’instrument moderne de la liberté d’expression.

« Cette vision rétrograde d’Internet comme un Minitel moderne, alors que c’est le plus puissant outil d’expression actuel, met la France au même rang que la Chine » commente Benjamin Bayart, président de FDN.

Non content de promouvoir cette vision archaïque et népotique, ce texte confie le travail de surveillance généralisée des citoyens à des milices privées, à la solde des abbayes de copistes.

On privatise la police, et pour faire bonne mesure, on la rend partisane !

Les moyens donnés à ces milices privées (surveillance a priori, sanction avant jugement, etc) étaient jusqu’à présent réservés aux affaires de terrorisme.

Cette loi, adoptée dans l’indiférence feutrée du Sénat, par quelques politiques soucieux de s’attirer les bonnes grâces d’industries du divertissement vieillissantes, a finalement été rejetée à l’Assemblée, les députés de la majorité ayant eu le courrage de s’absenter pendant le vote.

L’ami du Fouquet’s, vexé de voir son texte rejeté par les représentants du peuple, représentera celle-ci pour tenter un passage en force le 29 avril.

Non content de bafouer les droits des 30 millions de citoyens internautes, le gouvernement a profité de son coup de force sur le texte, en séance de nuit, pour faire voter par une poignée de godillots des amendements contraires à ce qui se négocie en ce moment même aux états généraux de la presse.

Pour un Internet libre, pour la libre circulation de la culture, des arts, de la connaissance et de l’information venez défiler contre HADOPI le 1er mai.

1er Mai Les Syndicats des Journalistes accueillent un cortège ANTI HADOPI organisé par Libre Accès, FDN, Musique Libre !, InLibroVeritas, Musique Tangente, MACAQ.

Rejoignez-les en défilant avec les artistes en défense de l’art libre !

Pour l’art libre et l’internet sans chaînes !

Rassemblement métro Port-Royal angle Denfert Rochereau à 14 heures.

Dogma Player beta

Cela faisait longtemps que Dogmazic n’avait pas évolué techniquement, et pour cause, nos développeurs étaient (et sont toujours) bien occupés par la conception du soft de l’Automazic

Cependant, il y a de cela une dizaine de jours, PeLF, qui officie aux côtés de xulops au développement de notre plateforme (mais aussi comme ce dernier artiste à ses heures), a commencé à travailler sur une nouveauté, entièrement codée en FLEX (la mouture open source de flash) : Dogma Player.

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On peut dire que le résultat est à la hauteur de nos espérances (et surtout de ses compétences en matière de développement), comme vous pourrez vous même le constater en allant sur cette page : http://dogmazic.net/player 🙂

Grâce à cet outil, il sera désormais enfantin de constituer des playlists, de les télécharger en zip,  mais aussi d’exporter le lecteur ou vous voulez !

vue_reelle.png

Impressionnant non ?

De nombreuses fonctionnalités sont au rendez-vous, comme la complétion automatique de vos recherches (par style, label ou groupe), le drag’n’drop des titres dans le lecteur, la sélection multiple (clic sur un morceau de la liste, puis maj clic sur le morceau terminant la liste à sélectionner). Et pour ceux qui disposent d’un compte sur Dogmazic, il est possible de se servir du Dogma Player pour gérer les favoris et playlists que vous avez déjà constitué sur le site…

Bref, il ne vous reste plus qu’à faire tourner l’info, et a exporter ou vous le voulez vos sélections de musiques préférées trouvées sur Dogmazic. Et si vous ne savez pas quoi passer comme musique en soirée, vous avez là un outil parfaitement adapté à la situation 😉

Dogma Player étant en version beta, il est loin d’être totalement terminé, n’hésitez pas à nous faire part des bugs rencontrés ou des améliorations que vous souhaiteriez que nous y apportions. (Pour les reports de bug, veillez préciser votre Os, votre navigateur ainsi que sa version)

Questions et réflexions autour des musiques libres.

Notre collègue et ami Christophe E nous a communiqué cette tribune, dans laquelle il livre son sentiment sur la musique libre, sans fard, sans tambour ni trompettes ! Oyez oyez bonnes gens, c’est du lourd 🙂

*Ce texte a été écrit hier, légèrement modifié avant sa publication, suite à une bonne nouvelle survenue ce midi.

Toutefois, j’ai souhaité maintenir sa publication parce qu’il tente d’effectuer une humble mise en perspective, dont la loi Hadopi n’est qu’un des paramètres, et je reste persuadé que cette joyeuse péripétie n’est malheureusement que temporaire, à moins que… On peut toujours espérer.

Dans un contexte post Hadopien récent, et son dénouement heureux*, la mise en concurrence des sociétés d’auteurs au niveau européen, l’expérience Buma / Stemra, l’évolution prévisible du consortium CC, il me semblait important de présenter un point de vue légèrement décalé au regard des différent textes, interventions, prises de positions que l’on lit/entend autour des cultures libres ces derniers mois.

En effet, une sorte d’état des lieux de la musique libre en raison des divergences qui semblent poindre entre certains acteurs me trotte dans l’esprit depuis quelques semaines,

notamment à la suite de la publication sur Numerama de la tribune « Ni SACEM ni Jamendo » par Libre Accès, les discussions qui s’en sont suivies, ainsi qu’à la suite des débats déplorables et criants d’incompétence (une fois de plus, pour ceux qui ont suivi en son temps Dadvsi) qui se sont tenus au sein de l’hémicycle, lors des discussions autour de l’HADOPI, et qui se sont bien terminés fort heureusement, puisque cela laissera peut-être le temps de la réflexion avant la prochaine « urgence » sur le sujet.

Du fantasme à la cruelle réalité (ou, comment confondre espérance de rémunération et outil juridique) :

Pour commencer, une petite réflexion concernant les tentatives d’assimilation/intégration des licences Creative Commons avec clause NC (non commercial) dans le système de collecte et de répartition des SPRD.

Premier constat:

– Les licences ouvertes (ou libres) relèvent de la gestion individuelle des droits d’auteurs au regard du CPI.

– Les sociétés de collecte et de répartition des droits d’auteurs, relèvent de la gestion collective au regard du CPI.

Certains artistes/groupes, labels, acteurs du libre, verraient d’un bon œil que les SPRD prennent en compte et acceptent de s’occuper de la collecte et la répartition des droits sur la diffusion des œuvres sous licence CC nc, afin, par exemple de rémunérer les passages en radio de ces œuvres, passages télé et autres.

Cela sous-entendrait que les SPRD ouvrent leur catalogue à des œuvres sous licence ouverte et proposeraient alors un mode de gestion « au titre »,

ce qui n’est par ailleurs pas la position de la SACEM par exemple actuellement.

On a l’exemple illustrant cette tendance avec l’ouverture aux « NC » dans le cadre de l’expérimentation Burna/stemra en cours actuellement.

Maintenant, cette tendance me pose un problème :

En admettant que la SACEM accepte de prendre en charge la collecte et la répartition des droits de diffusion sur les titres NC des artistes qui le souhaiteraient.

Cela voudrait dire que toutes les diffusions par des radios dites commerciales devraient être rémunérées par versement de droits.

Mais aussi et cela me paraît juste, que toutes les diffusions sur des sites internet à caractère commercial (rémunération par la publicité par exemple) devraient logiquement être rémunérées par versements de droits.

Et nous arrivons-là vers la première contradiction de ce modèle.

– Une radio est un point de diffusion hertzien.

– Un site internet est un point de diffusion câblé.

Pourquoi ces artistes qui veulent rejoindre la gestion collective tout en restant en gestion individuelle (encore une contradiction) demanderaient des rémunérations sur les passages radio et pas sur les multiples sites internet commerciaux où leurs titres sont en téléchargement légal ?

On me rétorquera que sur un site comme Jamendo par exemple, certes, il y a de la pub, certes, ils ont un modèle de négoce avec des annonceurs mais ils font « signer » un « disclaimer » ou une dérogation à la clause NC.

Sur le papier, ça peut sembler tenir la route, mais cela induirait implicitement que la société de gestion collective en charge de la collecte et de la répartition devrait percevoir des droits sur une radio commerciale, et laisser diffuser sur un site commercial parce que l’auteur a signé au titre de la gestion individuelle une dérogation à la clause NC.

On ne parle donc plus de la difficulté de gérer « au titre » et « à la diffusion » mais de gérer aussi les exceptions contractuelles envers les tiers, inhérentes à la gestion individuelle.

Il me semble que ce modèle est injuste pour les diffuseurs, difficile à mettre en œuvre, contradictoire au regard de la séparation des modes de gestion des droits d’auteurs,

et au passage je souhaite bien du courage à ceux qui auront un jour à concilier tout cela…

La gestion individuelle doit rester dans le cadre de sa portée juridique et ne doit en aucun cas être en partie traitée comme exception périphérique de la gestion collective.

Même si cette porte ouverte permettrait à quelques-uns une « espérance de rémunération » (et on peut se demander sur quelles bases financières, quels calculs, quelles méthodes),

elle ne concernerait qu’une infime part des œuvres diffusées et le volume de droits traités serait extrêmement minime au regard de l’ensemble des droits perçus et redistribués par la gestion collective tout en demandant une mise en œuvre extrêmement coûteuse pour les sociétés de gestion.

Et en plus, que penser de cette exclusion « de fait » des artistes publiant sous licence libre qui n’auraient pas utilisé une clause NC ou dont les œuvres seraient sous LAL,

c’est une limite discriminatoire qui ferait porter à la NC, déjà bien controversée, une valeur d’exception alors qu’elle est une licence des plus utilisées (souvent sans en comprendre la portée réelle).

Les défenseurs et porteurs de cette idée ont souvent pour argument que l’on ne peut pas rester au RMI et faire de la musique, qu’il faut trouver des moyens de rémunération et que cette solution peut en procurer.

Pourquoi pas, mais je tiens tout de même à exprimer les points suivants :

– Le système de répartition de la SACEM ne permet pas à tous les auteurs de toucher de l’argent et de payer leur loyer, mais à une minorité au regard des quotas de répartition et du nombre total de sociétaires.

A quel titre serait-ce différent si les clauses NC sont incluses dans ce système ?

– Le fait que pour 400 000 artistes qui produisent des œuvres, seuls quelques uns trouveront un public et pourront, dans une certaine mesure, dégager une valeur économique autour de leurs œuvres et de leurs prestations, est la seule réalité.

– Par ailleurs, il se peut que des œuvres « ignorées » à un instant « T » trouvent un public sensible quelques années plus tard, et ce n’est pas une question d’exposition médiatique (même si cela joue indéniablement dans le système industriel) mais bien une question de résonance de ces œuvres envers une sensibilité commune.

Vient ensuite le problème lié aux sommes perçues par les sociétés de gestion collectives au titre des redevances (passages en radio, forfait salles concerts) qui, effectivement ne sont pas redistribués aux artistes dont les œuvres sont sous licences ouvertes,

puisque naturellement ils n’ont pas adhéré aux statuts de la SACEM et ne peuvent donc pas prétendre à percevoir des droits.

Cela est parfaitement injuste mais il n’existe pas en l’état actuel de solutions pour répartir ces forfaits.

Je retournerais la question :

Pourquoi les Radios et les Salles de concert payent quelque chose à la SACEM quand elle passent de la musique libre ou produisent un artiste/groupe libre en concert ?

Le coup du forfait devient une forfaiture, certainement efficace à l’époque où les licences ouvertes n’existaient pas, mais qui doit être remis en question à présent.

Une identification commune standardisée et officielle des contenus diffusés et produits sur le spectacle vivant permettrait d’une part d’éviter ce problème, et d’autre part suivant les contrats effectués au titre de la gestion individuelle entre les artistes et les radios ou les salles de spectacle, la perception se ferait directement.

La réflexion peut être la même concernant la taxe sur les supports numériques et bien entendu sur la fameuse licence globale ou forfait, qui non seulement permettrait de noyer les cultures libres en leur supprimant leur spécificité légale sur les droits de reproduction mécanique.

Spécificité qui reste à ce jour la seule valeur de différence notoire comparativement aux œuvres numériques relevant de la gestion collective dans le cadre de la diffusion sur internet.

C’est en ce sens que nous devrions œuvrer auprès de la SACEM (et des autres SPRD), du ministère de la culture, vers une reconnaissance pleine et entière des cultures libres

et de la gestion individuelle plutôt que d’imaginer des statuts hybrides incompatibles avec la réalité des usages et les immobilismes institutionnels.

De la création d’un syndicat d’auteurs du « libre » (ou comment continuer à confondre…)

Autre idée qui fait son chemin depuis quelques temps :

La création d’un syndicat d’auteurs du libre, permettrait en théorie de jouer ce rôle de collecte et de répartition (à l’image des SPRD de la gestion collective) et donc,

dans le monde merveilleux du nouvel ordre des licences ouvertes, gèrerait les multiples contrats inhérents à l’exercice de la gestion individuelle et ferait de la répartition sur les droits de diffusion et droits voisins.

Ma première réflexion fut que ce n’était pas une mauvaise idée, dans le sens où nombre d’artistes/groupes ne savent pas vraiment comment gérer leurs droits et les contrats avec les tiers (producteurs, tourneurs, éditeurs, labels, diffuseurs) qu’ils se doivent d’assumer dès lors qu’ils optent pour la gestion individuelle.

Mais en définitive, il s’agit de créer une société gestion collective pour des créateurs ayant opté pour la gestion individuelle et donc de fait adhéré à un système on ne peut plus libéral et individualiste où l’auteur est le seul maître de sa gestion et du devenir de ses œuvres.

C’est encore un contre-sens.

L’auteur est bel et bien le responsable de ce qu’il advient de ses œuvres et il doit l’assumer ou changer de mode de gestion.

C’est bien de pouvoir disséminer ses œuvres sur le net, mais c’est pas bien de devoir gérer ses droits et ses contrats avec les tiers … Bienvenue dans la réalité.

Par ailleurs, l’infrastructure, la logistique, les moyens financiers permettant de monter une société de gestion, la mise en place d’un système de collecte et de répartition, la mise en place du système déclaratif pour des diffuseurs….

Tout ceci demande des moyens financiers, humains et temporels qui sont au delà de ce que peut faire « le libre » dans sa plus grande diversité, hormis sur deux modèles hybrides qui se font passer pour des sociétés d’auteurs par stricte opposition à la SACEM (comme si cette posture était le seul moyen de reconnaissance), mais qui en réalité ont la volonté de faire un business plus que de jouer le vrai rôle d’une société d’auteur…

Et finalement … il existe une société d’auteurs qui fait ça depuis 150 ans, qui le fait pas trop mal au regard d’autres systèmes collectifs, et qui, malgré nombre défauts notamment sur le mode de calcul de la répartition bien discutable à plusieurs égards, fait son chemin.

C’est tout simplement la SACEM.

Pourquoi vouloir réinventer la roue?

Amis artistes du « libre » si vous voulez toucher des droits sur la diffusion de vos œuvres sans avoir à gérer directement les diffuseurs, adhérez à la SACEM, c’est bien plus simple.

En conclusion, opter pour les licences ouvertes est un engagement dans une voie individuelle, mais surtout est un engagement dans un champ culturel alternatif.

Vouloir utiliser les licences ouvertes comme « tremplin », « pour se faire connaître » et ensuite râler parce que c’est dur de toucher des droits et de gérer ses contrats, imaginer des solutions hybrides, pour finalement s’inscrire à la SACEM est bien la preuve du peu de cas que font certains de l’esprit réel des licences ouvertes et qu’ils confondent outil juridique et espérance de rémunération.

Je renvoie d’ailleurs à l’interview suivante d’Angil & the Hiddentracks, qui tourne internationalement, dont les disques sont distribués à la FNAC : http://www.froggydelight.com/article-6488-3-Pourquoi_je_ne_suis_pas_a_la_Sacem.html, qui montre que l’on peut avoir une vision cohérente tout en utilisant les licences ouvertes, et qu’il s’agit plus aujourd’hui d’un enjeu de formation des tiers et des artistes qu’autre chose…

Il me semble donc qu’il serait bien plus intéressant de développer un système de support/conseil à l’attention des créateurs ayant opté pour la gestion individuelle, permettant de les aider à faire valoir leur droits en cas de conflit, ou tout simplement de leur proposer des solutions simples comme des contrats types pour les relations avec les tiers (éditeurs, tourneurs, salles de spectacles, labels, diffuseurs etc.).

Ce support pourrait aussi être à l’attention des tiers bien entendu.

Mais certainement pas de faire le boulot à leur place.

J’ai longtemps milité pour que l’association Musique Libre ! mette en place un tel système de support pour les artistes/groupes et structures adhérentes (et cotisantes…), j’espère qu’au cours des mois qui viennent elle verra le jour, parce que cela rentre tout à fait dans ses objets, ce pourrait être intéressant de confronter ainsi organisation de support aux auteurs/structures avec les pseudos pourfendeurs de SACEM idéologiques ou économiques …

Le subtil mélange des genres et la responsabilité de tous les acteurs culturels :

Alors on nous explique, qu’à partir de maintenant, gare à ceux qui téléchargent, ça va barder, on va tous vous couper, vous faire payer, vous éradiquer.

*Bien que cette position soit temporairement écartée depuis ce midi, je rappelle tout de même que la DADVSI s’applique toujours, et que ce n’est pas un revers de fortune qui calmera l’ardeur de certains, avec la possibilité de seconde lecture.

Mais au fait ceux qui téléchargent quoi?

Du SACEM, du copyright, du Publishing, du LAL, du BY-SA?

Sur quelle plateforme ? labellisée ministère de la culture ? Commerciale ? Dogmazic ?

On va mettre un peu d’ordre:

Les cultures libres ne sont pas reconnues par le législateur, ni par le ministère de la culture, qui dans sa grand croisade pour la rémunération de ses auteurs n’a pas pris en compte environ 180 millions d’œuvres libres (en fait c’est peut être 200 ou 150) qui circulent sur internet.

Vont se mettre en place une série de systèmes techniques de filtrage chez les FAI (dans un an ou deux … ou jamais vu le coût) d’une part et se constituer des société privées de « tracking » du contrevenant en herbe téléchargeur pirate d’autre part.

Comment les uns ou les autres vont savoir qu’un internaute télécharge une œuvre sous licence ouverte ?

A l’aide de quel identifiant sur les fichiers numériques et à l’aide de quel système de reconnaissance ?

Cela sous entend qu’un certain nombre d’entre-nous qui téléchargent très fréquemment des contenus légaux se verrons notifier par emails qu’il faut arrêter et se rendre tout de suite sur virginmachin, Ithunes ou aller écouter ce que Deezer veut bien « streamer » tout de suite sous peine de coupure de l’accès internet, sympa…

Parce que cela pose un gros problème:

L’internaute lambda, comment sait-il, à la base si ce qu’il télécharge relève de la gestion collective (SACEM), du copyright , du publishing ou des licences ouvertes?

C’est marqué où sur l’internet ?

Sur Jamendo ? Sur Dogmazic ?

Oui, c’est marqué, mais est-ce vraiment le cas à 100%

N’y a-t-il pas quelques petits malins qui postent des trucs pas bien nets du genre « remix copyright » ou tout simplement des sociétaires de la SACEM qui se foutent complètement que la personne qui télécharge puisse être sous le coup d’une amende ou d’une suspension de service internet, voire au pénal pour contrefaçon, parce que de toute bonne foi, elle a téléchargé un album sur torrent avec Jamendo ou plein (beaucoup plus) de titres sur Dogmazic ?

Il se trouve que pour ce qui concerne Dogmazic, un travail de modération est effectué via le CATEL (système de recherche des ayants-droits de la SACEM), et cela permet d’identifier ceux qui auraient déposé dans l’archive musicale des œuvres protégées.

Mais d’une part ce système n’est pas infaillible puisqu’il ne regroupe pas l’ensemble des œuvres protégées et d’autre part il existe toujours des moyens de « passer à travers ».

Cette responsabilité, des sociétés de gestions, des éditeurs de sites, des artistes eux-même est très importante et peut avoir des conséquences graves sur les publics.

Cet aspect n’a jamais été abordé dans les discussions autour du téléchargement illégal, parce que c’eût été l’aveu de fait de l’existence d’une culture alternative légale au delà des catalogues industriels commercialisés qui semblent être les seuls vrais fonds culturels digne d’intérêt pour nos institutions et le législateur.

Du coup on se réfugie ver le « streaming » parce que là on n’a pas besoin de causer du reste et on fait de la pub pour une plateforme longtemps restée dans l’illégalité, mais on est plus à une compromission près.

Parce que c’est bien joli de partir en croisade contre les salaud de « pirates » mais quid des artistes qui foulent du pied le droit d’auteurs en publiant illégalement leurs œuvres protégées sur des sites dont l’archive musicale doit contenir exclusivement des œuvres sous licences ouvertes?

Il me semble que les sanctions (puisqu’on a préféré la sanction à l’information, l’identification claire des œuvres vis à vis des publics) doivent être appliquées dans les deux sens, ou ne doivent pas être appliquées.

C’est en ce sens que les sociétaire de la SACEM publiant illégalement une œuvre protégée sur un site de musique sous licences ouvertes devraient être taxés pécuniairement à la hauteur du préjudice subi par la personne qui a téléchargé leur titre sans être informé de la nature de celui-ci.

Dans le libre, on peut devenir aussi débile que les autres si on veut (et sans trop forcer) mais (je l’espère) on préfèrera toujours l’information, l’explication, l’éducation à la répression aveugle et stupide qui reste une preuve de faiblesse, d’incompréhension, de facilité et de renoncement face aux mutations qui s’opèrent dans le rapport public/œuvre/artistes depuis plusieurs années maintenant.

Enfin, malgré l’aspect sécuritaire en matière de liberté que propose cette technologie, j’en suis venu à la conclusion que la seule solution à long terme permettant de bien différencier les œuvres qui relèvent d’une protection sur les droit au téléchargement (puisque personne veut informer) et celles qui sont légalement téléchargeable reste l’étiquetage numérique ou « adn » qui permettrait de bien spécifier aux public:

« ça c’est du libre / ça c’est du pas libre. »

Pourquoi mettrait-on en place des systèmes de traçabilité pour les œuvres protégées et ne ferrait-on pas de même, à l’identique pour des œuvres libres?

Et il n’est pas besoin de faire des « groupes de recherche et de réflexion » des « expériences » avec force financements publics, 5 gugusses dans un garage et les tag id3 qui existent déjà depuis longtemps vous pondraient ça en peu de temps (j’exagère, mais à peine).

Mais j’avoue que cet étiquetage type « code barre » a quelque chose de fascisant dans sa nature qui me pose de grandes questions sur le fantasme du « contrôle » de l’internet.

La « traçabilité » si elle peut être un élément primordial en matière de consommation, de protection de la chaine du froid pour des raisons de santé publique peut rapidement dériver en contrôle sur les échanges numériques, c’est plus que moyen…

Et je ne parles pas des dérives commerciales qui s’en suivraient en matière de filtrage des contenus sur les lecteurs propriétaires, qu’ils soient embarqués dans les systèmes d’exploitation des ordinateurs ou simplement intégrés dans les baladeurs numériques… On en reviens toujours aux mêmes problématiques.

C’est surtout in fine une question de bon sens et de responsabilité de l’ensemble des acteurs qui s’assoient tous autour d’une table et qui cherchent ensemble la meilleure façon d’informer les publics et surtout les jeunes générations sur le fait que l’on est pas forcément un pirate quand on télécharge une musique sur internet du moment que c’est un titre sous licence ouverte, c’est pas bien compliqué.

Les sociétés de gestion, le ministère de la culture, les acteurs du libre, le législateur, tous portent cette responsabilité et refusent de l’assumer.

Encore faudrait-il que les œuvres sous licences ouvertes restent accessible dans quelques années , cela voudrait dire qu’elle n’ont pas été engluées dans le magma des sites proposant des contenus sans identification précise (myspace, youtube, daylymotion, jamendo et autres) qui n’ont rien à secouer du droit d’auteur, ou bien qu’elles n’auraient pas été rendues inaccessibles pour les non « initiés » à cause des systèmes de filtrages à venir.

Parce qu’il s’agit bien entendu et ce, depuis le début d’une guerre pour la prise de contrôle des échanges numériques, arriver à canaliser le consommateur dans les tuyaux du net, ne plus lui fournir d’opportunité d’aller cliquer ailleurs que là où on a quelque chose à vendre, et le « commerce de la culture » n’y échappe pas.

Le fameux modèle économique: (il doit bien exister un quelque part, ah non ? ben merde alors !)

Le modèle économique, la rémunération, le pognon, la caillasse, les brouzoufs.

Tout le monde en veux, c’est bien naturel.

Petit état des lieux:

Concernant le marché industriel, c’est tout simple, c’est un fabricant d’ordinateurs et de baladeurs numériques qui gère le marché en ligne, à 0,99 euro le titre (depuis peu, de 0,69€ à 1,29€).

C’est plié depuis longtemps, tant pis pour les Majors qui se rabattent sur de la vente forfaitaire de téléchargements sur des téléphones portables, bonne chance à vous.

Forfait, Téléchargement, les mêmes qui crient que la licence globale est une vaste arnaque proposent des Forfait pour du téléchargement légal … Pas mal.

Reste des groupements d’indépendants qui tentent de survivre, voir de se développer dans une alternative sérieuse comme CD1D par exemple, et cet aspect est tout à fait intéressant au regard d’une collaboration possible entre les acteurs du libre et les indépendants.

Parce qu’il me semble que les lignes de fracture économiques ont évoluées, et que le fameux libre vs Majors a fait long feu.

Que les seuls modèles soutenus sont ceux de l’industrie du disque, y compris à coup de lois de régulation afin d’orienter le marché en leur faveur.

Aussi bizarre que cela puisse paraître, et, malgré les circonstances économiques actuelles, la régulation des marchés n’est pas la même pour tout le monde, la libre concurrence non faussée, s’arrête ou commence l’intérêt de quelques lobbies.

Et le législateur porte la responsabilité de ce traitement discriminatoire envers les cultures alternatives au profit exclusif des industries, qu’elles soient des loisirs numériques, des fournisseurs d’accès internet transformés en vendeurs d’images, ou de l’industrie du disque.

Les lignes de fractures, dans le cadre de la défense d’une alternative culturelle en complément de l’industrie se situent plus aujourd’hui dans un affrontement indépendants/Libre vs Industrie.

Parce que les cultures libres seules ne feront pas le poids en continuant d’avancer en ordre dispersé, essayant ça et là de grappiller quelques marchés de niche, mais rien de bien terrible au final.

Cela peut paraitre bizarre de vouloir travailler de concert avec les indépendants (attention, les vrais, pas les faux indés affiliés à l’industrie) parce qu’il s’agit de développer des réseaux de diffusion et de distribution indépendants justement des canaux habituels,

porter ces cultures au delà d’internet, monter des réseaux de distribution physiques et numériques alternatifs et proposer un champ culturel complètement différent aux publics.

Au milieu de tout cela, l’économie autour des cultures libres, comment dire … ce n’est pas grand chose.

L’activité économique autour des cultures libres se situe principalement sur internet à ce jour, avec son cortège de pseudos initiatives plus ou moins douteuse quant à la sincérité de leur démarche.

Et les artistes dans tout ça?

Quand on parle de « modèle économique », on pense rémunération des artistes.

Mais en fait pour le moment , c’est rémunération des plateformes internet, pour le reste, on verra plus tard, circulez !

Il me semble tout de même, que, malgré ce mauvais départ , tout reste encore à construire.

Cela ne fait que 2 à 4 ans pour certains que des initiatives sont testées, affinées, c’est très peu finalement au regard des modèles « classiques ».

Certaines initiatives sortent un peu du lot, abandonnant le modèle économique pub contre accès au catalogue pour proposer une vraie valeur ajoutée pour les artistes, comme Pragmazic (un peu de pub au passage), CD1D et quelques autres, en opposition avec les plateformes qui se disent « équitables » qui qui retiennent 50% des ressources pour leur fonctionnement.

Le sens de ces initiatives est de privilégier le revenu des créateurs (artistes / Labels) par rapport au revenu de la plateforme d’une part, et de permettre au publics de vraiment faire un acte de soutien aux artistes dont ils achètent les œuvres sur support physique ou numérique, une action de soutien plus qu’un acte de consommation impulsif …

Bien que ce soit assez marginal comparativement au modèle basé sur le négoce d’espaces publicitaires, cela va dans le sens d’un développement respectueux des œuvres et des artistes.

Parce qu’il ne faut pas non plus se tromper sur ce point :

Vouloir absolument forcer à la rémunération de tous les artistes est un contre-sens fondamental, comme expliqué plus haut.

Mais permettre à tous de connaitre un plus grand nombre d’œuvres publiées, peut effectivement favoriser la découverte et aider à provoquer ces instants de « communion » œuvre/public, si ils doivent arriver bien entendu.

L’initiative Automazic (allez, encore un peu de pub) dont l’objet est de favoriser la découverte des cultures libres, les porter hors d’internet vers des publics qui n’en ont pour la grande majorité jamais entendu parler, participe à cette dissémination.

Permettre une meilleure diffusion scénique des artistes va aussi dans le même sens, parce que la scène reste une source de « revenu » potentielle pour certains bien plus intéressante que la vente de disques ou de fichiers en ligne.

Dans ce sens uniquement, on arrive à « aider » l’émergence d’un tissu économique, qui n’est pas incompatible avec l’existant, ou à défaut et plus humblement, on jette les bases de ce qui reste à inventer , si l’on veut réellement créer une rupture saine entre le système industriel monolithique et les cultures alternatives (libres ou pas).

Ce n’est certainement pas en « singeant » les systèmes industriels ou en favorisant l’existant par une modification de la législation que l’on arrivera à accompagner le changement radical qui s’opère depuis quelques années, à la fois dans le rapport public/œuvre/artiste et dans la dématérialisation des œuvres.

Les cultures libres ont encore besoin de se faire connaitre auprès des publics, les artistes qui ont choisi les licences libres ont encore du chemin à parcourir avant d’être reconnus et respectés, mais l’espérance de rémunération, elle ne dépend ni des licences ouvertes, ni de la SACEM, mais bien d’un instant particulier qui fait qu’une œuvre rencontre un public, c’est magique et cela n’a absolument rien de rationnel ni de temporel.

Christophe-E.

27 mars – Soirée de CONCERTS ANTI HADOPI organisée par Libre Accès

Parce qu’il est important de rester mobilisés, Libre Accès organise un concert Anti HADOPI le 27/03 à l’Espace Jean Dame.

Flyer

Dans le contexte actuel liberticide entourant le vote de la loi HADOPI criminalisant les échanges entre internautes et posant de graves dangers quand aux libertés individuelles, l’association Libre Accès vous invite à un concert à entrée libre présentant dans la salle Jean Dame dans le 2° arrondissement de Paris trois formations ayant fait le choix des licences libres et légales, en partageant leurs oeuvres sous licence Creative Commons. Ce concert est l’occasion de rassembler trois des meilleures formations entre folk et électro-rock, VS, Throw Panda Bat et Jullian Angel.

Libre à vous de télécharger dès maintenant les œuvres de ces artistes gratuitement et légalement, comme il vous appartiendra de venir vous chatouiller les oreilles des voyages électroniques de VS, de la prose réchauffée aux machines de Throw Panda Bat ou encore de celle poétique de Jullian Angel. De même des stands proposant des albums sous licence de libre diffusion du meilleur de la scène indépendante libre seront à portée de clé usb ou d’ipod. Une présentation d’une demi-heure des licences Creative Commons et de l’opportunité qu’elles représentent dans le cadre de la crise actuelle ayant mené à l’HADOPI conclura cette soirée.

Vous êtes donc conviés à cette rencontre Salle Jean Dame, 17 rue Lépold Bellan, Métro : Sentier, le Vendredi 27 mars à partir de 19h.

Dans le cadre de ce Concert une rencontre autour de la loi « Internet et Création » est organisée :

Les premiers débats à l’Assemblée nationale sur le projet de loi Création et Internet ont eu lieu pendant la deuxième semaine de mars 2009.

Ils sont l’objet d’une attention exceptionnelle, et le site de l’Assemblée nationale a enregistré des records de connexion pour la diffusion de la séance en direct. Ces débats houleux sont massivement commentés par les grands media et sur Internet.

Après une interruption de deux semaines, les députés reprendront l’examen du projet de loi la semaine du 30 mars.

Profitant de cette pause parlementaire pour faire un nouveau point sur le projet de loi, Libre Accès vous invite à partager des analyses/prospectives avec : Alix Cazenave (April) Jérémie Zimmermann (La Quadrature du Net) Benjamin Bayart (FDN) et en présence de Mme Martine Billard (Députée de Paris – Vert) qui prend activement part aux débats, participera à ces échanges et nous livrera son point de vue sur ce texte.

Libre à vous de télécharger dès maintenant les œuvres de ces artistes gratuitement et légalement, comme il vous appartiendra de venir vous chatouiller les oreilles des voyages électroniques de VS, de la prose réchauffée aux machines de Throw Panda Bat ou encore de celle poétique de Jullian Angel. De même des stands proposant des albums sous licence de libre diffusion du meilleur de la scène indépendante libre seront à portée de clé usb ….

Venez nombreux

Rendez-vous donc : Espace Jean Dame 17 rue Léopold Bellan 75002 Paris

Avec le soutien de : APRIL, LA QUADRATURE DU NET, FDN