Gestion individuelle/gestion collective, les frontières bougent (?)

Cet été a été riche en signes de reconnaissance institutionnelle des licences de libre diffusion, à commencer par ce rapport du CSPLA et l’avis qui l’accompagne, qui témoignent enfin d’une vraie prise en compte de la gestion individuelle et d’une compréhension impeccable et très bien documentée du mécanisme des licences et contrats que nous utilisons sur dogmazic et ailleurs. A lire de toute urgence !

image issue du rapport du CSPLA

Dans ce rapport publié en juillet dernier, p. 31-32, la SACD, doyenne des sociétés de gestion collective française (fondée en 1777) est la première à reconnaitre explicitement les LLD.
Et la démarche va plus loin puisqu’il est question pour cette SPRD d’une « tolérance » (n’entrainant toutefois aucune modification de ses statuts) : en clair, il est permis aux sociétaires SACD d’utiliser les contrats Creative Commons comportant la clause non commerciale.

Et cela ne s’arrête pas là. Récemment, nous avons appris que la Buma-Stemra équivalente néerlandaise de la SACEM, emboîte le pas à la SACD et lance avec Creative Commons un projet pilote d’un an. Voici ce qu’en dit Mélanie Dulong de Rosnay sur la liste CC-fr :

« (…)voici le lancement d’un projet-pilote d’une durée d’un
an aux Pays-Bas destiné aux auteurs-compositeurs de la société de
perception et de répartition des droits Buma-Stemra.

Ses membres peuvent utiliser l’une des licences Creative Commons qui
réserve les utilisations commerciales (avec l’option NC). Ils
recevront les rémunérations perçues pour les utilisations
commerciales de leurs oeuvres par l’intermédiaire de la Buma-Stemra.
Les métadonnées CC renverront au site de la Buma-Stemra pour les
utilisations commerciales.

La Buma-Stemra retransférera aux membres les droits nécessaires à
l’exercice de l’autorisation d’utilisation non commerciale. Le
processus s’effectue sur demande en ligne et nécessite environ 30
secondes par morceau. Les informations seront gérées dans la base de
données de la société et permettront la gestion de la perception et
de la rémunération des utilisations commerciales.

Grâce à ce projet-pilote de la Buma-Stemra et de Creative Commons
Pays-Bas, les musiciens ont à présent plus de liberté de choix dans
l’exercice de leurs droits. Ils ne sont plus contraints de choisir
entre la gestion collective et la gestion individuelle sous CC.

Les musiciens qui utilisent déjà l’une des 3 licences NC peuvent
rejoindre la Buma/Stemra qui collectera les rémunérations issues des
utilisations commerciales de leurs oeuvres sous CC-NC.

le communiqué de presse en anglais :
http://www.creativecommons.nl/bumapilot/070823persbericht_en_web.pdf

le site du projet-pilote en néerlandais :
http://www.creativecommons.nl/extra/bumapilot

le projet sur le site de la Buma/Stemra en néerlandais :
http://www.bumastemra.nl/nl-NL/MuziekrechtenVastleggen/Flexibel
+Collectief+Beheer/Pilot+met+CC.htm

l’interface de choix de la licence :
http://www.creativecommons.nl/extra/bumalicense/
(des traductions en anglais devraient suivre dans les jours à venir,
notamment de la définition d’utilisation commerciale, on peut tester
l’interface sans être parfaitement néerlandophone) »

Voilà qui change pas mal de choses n’est-ce pas ? Mais bien entendu, on est en droit de se se demander si ces tentatives de conciliation entre gestion individuelle et gestion collective ne cachent pas en fait une manœuvre visant à obliger les artistes qui ont fait le choix des licences ouvertes à adhérer à une SPRD s’ils veulent percevoir des droits sur les utilisations commerciales de leurs œuvres…

9 réflexions sur « Gestion individuelle/gestion collective, les frontières bougent (?) »

  1. je rejoins rico sur la vigilance

    le but, il me semble, de dogmazic est de détruire la logique marchande et dégueulasse des maisons de disque.
    je ne comprend pas quels intérets ils auraient à travailler avec les licenses libres, si ce n’est pas pour les controler et les récupérer.
    si une telle collaboration se met en place, il ne faut surtout pas perdre les perspectives poilitiques qui nous animent.

    c’est comme edf qui commence à vendre l’énergie solaire, ainsi elle surf sur les problèmes écologiques que l’on se pause de + en +; elle récupère le problème et au lieu que ce soit une menace pour elle ( tout le monde a son paneau solaire et personne n’a plus d’intéret économique dessus )elle le prend pour elle et s’en accommode.
    les exemples sont nombreux, un truc bidule comme la sacem ne cherche à faire que des choses qui vont dans son propre intéret; et il ne faut pas croire que si elle collabore avec les licenses libre elle le fairait poussée par un désir de partager ce qu’elle possède.

    avec ce genre d’initiative on trouve évidemment des choses positives, mais c’est tout de même une stratégie qui vise à assagir, atomiser, normaliser les volontés de changements.

    à nous dêtre irrécupérable , et de bien réfléchir où on met les pieds!

    sinon on va de + en + vivre dans un monde où les boites à caca parlent de plus en plus fort, ce sera une apocalypse de merde et de morve qui explosera dans nos salles de bains, et petit à petit on se transformera nous même en une espéce de choses fisqueuse qui bavera du pus en se penchant sur les landeau plein de bébés

  2. Sauf que, les sondages représentent 19% des sommes collectées. Et les sondages sont pondérés par notamment des données sur la consommation musicale (industrie du disque, ventes des distributeurs…).

    La gestion collective est pertinente pour la gestion des médias (nombre de passages audios dans tel ou tel média à vocation commerciale), elle l’est beaucoup moins en ce qui concerne les concerts, les ventes de cd puisqu’à chaque fois un contrat est signé entre un producteur et un auteur (et là les problèmes dont parle sam sont toujours vrais).
    Les revenus pour « droits d’auteurs » devraient profiter à l’ensemble de la chaîne de création du disque en élargissant le fond commun d’action culturelle et celui d’action sociale pour mettre un peu plus d’égalité dans le système.

  3. sam a raison…c’est le deuxième effet quissscoool.

    La gestion individuelle est traitée par l’artiste et le producteur ; de ce fait pas de frais de dossier ; le cas par cas, même automatisé ( à quand un logiciel libre et une plateforme pour la gestion des droits d’auteurs et l’édition des contrats?), permet une meilleur traçabilité de l’utilisation.

    La gestion collective occasionne des frais et la répartition se fait par sondage…autant dire…que les artistes libres, comme les sociétaires SACEM se verront amputés d’une partie des redevances pour frais ; redevances calculés par stat et qui ne prend pas en compte des utilisations peut être moins fréquentes mais certaines.

    En passant par les société dse gestion la part des redevances des artistes PAI (production artistes inconnus) ne tombera plus dans le fond de soutien (auquel tous les artistes ont le droit) mais dans les redevances percues,

    a suivre…

    didier alias eisse

  4. Pour cela il faudrait connaître les statuts de la Buma-Stemra ou les termes des accords entres artistes CC et la SPRD.

  5. pour répondre a Rico,

    de mon point de vue, la gestion individuelle de droits de diffusion commerciale est dangereuse, elle ne permet pas de mettre tout le monde sur le même pied d’égalité lors d’une négociation (par exemple si le fameux jean jacques goldman obtiendra certainement plus que l’autre fameux aisyk pour une diffusion sur france bleue pays de savoie).
    cela ne veut pas dire que le système de redistribution est aujourd’hui équitable, mais juste qu’il permettrait de rémunérer les auteurs / compositeurs s’il était mieux géré.

    le gros danger que je vois dans cette annonce, c’est si au bout d’un an, ils annulent la possibilité des CC nc et qu’ils gardent ceux qui ont souscrit à leur système de répartition en les obligeant à ne plus diffuser leur musique librement dans le cas d’un usage privé. là, oui …

  6. En même temps il ne faut pas crier « victoire » trop vite. Ce n’est qu’un « projet pilote d’un an » qui sera évalué. Si le projet donne de faibles résultats ou s’il coûte trop à la SPRD de gérer les CC, il sera évacué et on reviendra au point de départ (ça expliquerait aussi la non-modification des statuts de la SACD).

    Maintenant j’ai plutôt l’impression que les CC-Fr et autres jouent plus sur le tableau « mise à disposition générale des œuvres (qu’elles soient SPRD ou non) à des fins non-commerciales » que sur les possibilités de créations collectives. D’où le scepticisme.

    Wait & See dirait l’autre. Je serait plutôt pour un « Work & Vigilance », histoire de ne pas se faire récupérer.

  7. Excessif ? Hé bien, je suis peut-être méfiant en effet, mais tout de même, il s’agit pour la buma-stemra d’une expérience d’un an, et il faut être sociétaire de cette SPRD pour en profiter.

    Sous un angle positif, ça permet à des sociétaires de SPRD de découvrir et d’utiliser les CC avec la clause nc.

    Mais quid de ceux qui utilisent déjà ces contrats ? A part en adhérant à ces SPRD, comment percevoir les rémunérations qui pourraient leur être dues ? Et si l’expérience d’un an se révèle non concluante ?

    Perso – et ça n’engage que moi hein – en tant que démissionnaire de la SACEM, je serais tout de même très embêté de devoir m’y réinscrire pour percevoir d’hypothétiques rémunérations. M’enfin, de toute façon, la SACEM n’à pas l’air pour l’instant de jouer l’ouverture à ce point 🙂

    Pour résumer : je ne suis pas contre l’idée de double gestion, mais je milite plutôt pour une gestion individuelle vraiment efficiente, et indépendante des SPRD. Que la SACD s’ouvre, c’est très bien, mais le fait qu’elle refuse de modifier ses statuts en conséquence, cela m’inquiète…

    Bon, cela n’en demeure pas moins que ce rapport du CSPLA est fort bien rédigé et très instructif, et que c’est déjà ça de gagné pour la libre diffusion.

  8. très bonne nouvelle, par contre la question de la manoeuvre à la fin me semble un peu excessive, non ?

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