A propos de l’expérience SACEM / Creative Commons

MISE À JOUR 2017

À ce jour près de 1500 œuvres de près de 100 auteurs/compositeurs sont concernées par cette expérience (Chiffres CSPLA, mars 2017).

La SACEM et Creative Commons viennent d’annoncer la mise en place d’une expérience pour une durée de 18 mois, permettant aux sociétaires de la SACEM de « développer la promotion de leurs œuvres » en ayant recours, tout en continuant à confier la gestion de leurs œuvres à la SACEM, aux licences Creative Commons, option Non-Commerciale (CC BY-NC / CC BY-NC-SA / CC BY-NC-ND version 3.0 France).[1]

Jusqu’à présent, la SACEM avait toujours officiellement refusé une telle compatibilité.

Depuis leur création, le collectif Revolution Sound Records[2], l’association Musique libre ![3] avec sa plateforme Dogmazic[4] militent et œuvrent pour la reconnaissance et la promotion de l’usage des licences dites « libres[5] » ou ouvertes. Dans ce cadre strict, nous pouvons dire que la prise en compte de ces pratiques et outils juridiques par la SACEM semble être une avancée… si elle prend ces outils pour ce qu’ils sont : une philosophie du partage.

Toutefois, face à la forme que prend cet accord, nous ne pouvons être que critiques devant cet effet d’annonce de la SACEM, soutenu par la fondation Creative Commons et son chapitre français.

Critiques concernant le modus operandi pour arriver à cette expérience, car nombre d’acteurs du mouvement du Libre (associations, labels, auteurs, mélomanes) ont été exclus des débats, et leurs différents points de vue et expériences, les rares fois où ils ont été entendus, ont été ignorés.

Critiques concernant la base « juridique » de l’accord, à savoir la version 3.0 France des licences CC (licence en cours de transcription, avec une évolution plus que contestable vers une augmentation des responsabilités de l’acceptant[6]). Nous nous étonnons aussi de voir que CC France continue d’ignorer les nombreuses réserves à l’encontre de cette version, réserves portées par certains acteurs du mouvement du Libre (acteurs de terrain en prise directe avec les usages au quotidien des licences libres et ouvertes).

Critiques envers la volonté de la SACEM (avec le poids qui est le sien — celui d’un monopole de fait) de baliser la notion d’usage commercial au sein de ces licences, et ce en exonérant l’auteur de toute responsabilité. De plus, il apparaît clairement que cette définition engendre déjà des problèmes concernant certains lieux comme les bibliothèques ou les médiathèques(7), certains sites de diffusion portés par des association loi 1901 (Dogmazic, RSR…), certaines initiatives et certains outils (bornes Pragmazic[8], netlabels, web radios).

Critiques et prudents envers la dialectique employée par cette annonce dans laquelle l’utilisation de licences libres ou ouvertes est considérée UNIQUEMENT comme un outil de promotion, dont la gratuité serait le seul argument, remisant au loin la philosophie et l’éthique liées au mouvement du libre et portées par un grand nombre d’auteurs et de mélomanes promoteurs des licences libres ou ouvertes.
« Libre » ne signifie pas gratuit, mais implique un autre rapport entre le créateur et le public.

Pour nous, membres de collectifs, d’entreprises et d’associations d’auteurs et de mélomanes, la musique libre est partie prenante d’une réflexion autour des enjeux politiques, économiques, sociaux et culturels de la création et de la diffusion musicale. Elle n’est pas un simple outil promotionnel au service de l’industrie musicale.

Les termes de cet accord montrent que la SACEM ne sort pas de son conservatisme. La SACEM pose des limites qui rendront la libre diffusion presque inapplicable pour ses propres membres et qui vont apporter aux actuels usagers des licences libres et ouvertes beaucoup de confusion, entraînant par la même occasion une insécurité juridique fâcheuse pour le public.

Ignorant les fondements de la culture libre, la SACEM s’impose (avec l’aide hélas du chapitre français de la fondation CC) sur un terrain qui s’est construit sans elle. L’ère de la simpliste dichotomie « amateurs / professionnels » est révolue : la musique sous licences libres ou ouvertes a désormais accédé à la reconnaissance par sa qualité, son pluralisme et sa diversité.

Des efforts de pédagogie doivent être poursuivis afin de démontrer qu’une alternative est réelle, que la musique sous licences libres ou ouvertes (au-delà d’un moyen d’expression et de visibilité) est aussi un acte philosophique, parfois militant ou revendicatif.

Nous appelons le chapitre français de la fondation CC à s’appuyer de nouveau sur la communauté du mouvement du Libre, à nous entendre, à prendre en considération nos revendications ou idées d’évolution, à ne plus se murer derrière un silence hautain et surtout à ne plus parler en notre nom. CC France n’est pas l’unique dépositaire du Libre en France (pas plus que la fondation CC ne l’est dans le monde), et il existe bien d’autres licences utilisées(9)).

Par conséquent, nous continuerons à ne pas diffuser d’œuvres d’artistes sociétaires de la SACEM, y compris ceux ayant opté pour une licence CC, tant que la SACEM n’aura pas corrigé sa définition de la non-commercialité, et qu’elle limitera l’expérience à des licences faisant peser des risques juridiques sur les utilisateurs.

De plus, les nouvelles orientations de CC France vers une culture libre uniquement promotionnelle sont très éloignées de notre façon de voir les choses concernant le lien entre le donnant droit et l’acceptant. Nous refusons de plonger l’acceptant dans l’insécurité juridique qui découle de la déresponsabilisation de l’ayant droit. Cela nous oblige à exclure et à refuser toutes les œuvres placées sous une licence CC version 3.0 France.

Nous appelons les acteurs du Libre partageant nos points de vue et perspectives à réfléchir COLLECTIVEMENT à la mise en place d’outils pour donner un réel cadre éthique à NOTRE vision du Libre et pour permettre au mouvement des cultures libres d’être réellement représenté, afin de pouvoir peser dans les débats à venir.

21 janvier 2012
Le collectif REVOLUTION SOUND RECORDS
http://www.revolutionsoundrecords.org
L’association MUSIQUE LIBRE !
http://www.dogmazic.net/

(1) : http://creativecommons.fr/549/
(2) : http://www.revolutionsoundrecords.org/
(3) : http://asso.dogmazic.net/
(4) : http://www.dogmazic.net/
(5): http://fr.wikipedia.org/wiki/Licence_libre
(6): http://aisyk.blogspot.com/2011/12/evolution-des-articles-5-et-6-des.html
(7): http://scinfolex.wordpress.com/2012/01/10/accord-sacemcreative-commons-quelles-incidences-sur-les-usages-collectifs/
(8) : http://www.pragmazic.net/
(9) : http://wiki.vvlibri.org/index.php?title=Tableau_Licences et http://www.dogmazic.net/static.php?op=copyleftLicence.html&npds=-1

En supplément, voici une communication que l’Association Musique libre! avait envoyé à la Sacem en 2010 qu prouve bien que nos revendications ont été envoyé il y a longtemps et qu’elles n’ont pas été prises en comptes à l’époque.

Communication de l’Association Musique Libre! du 6 mai 2010.

Pour ajouter votre signature à ce communiqué :
http://www.revolutionsoundrecords.org/index.php?e=page&id=957

7 réflexions sur « A propos de l’expérience SACEM / Creative Commons »

  1. Bonjour,

    Bien d’accord avec tout ce que vous dites dans votre article.

    Est-ce que vous pourriez nous expliquer les différences entre CC 3 et CC 2? J’ai regardé un peu mais ce n’est pas très visible pour moi.

    PS: pourriez-vous supprimer les spams évidents du type qui met un pseudo en arabe?

    Bon courage pour la suite, les rapaces sont partout 🙁

  2. Désolée mais votre vision du libre n’est pas la mienne ni celle de nombre de libristes que je connais. Non Commercial et No Derivative ? C’est quoi, c’est du libre à deux balles ?Désolée mais votre vision du libre n’est pas la mienne ni celle de nombre de libristes que je connais. Non Commercial et No Derivative ? C’est quoi, c’est du libre à deux balles ?Désolée mais votre vision du libre n’est pas la mienne ni celle de nombre de libristes que je connais. Non Commercial et No Derivative ? C’est quoi, c’est du libre à deux balles ?

  3. > NOTRE vision du Libre

    Bonjour,

    Désolée mais votre vision du libre n’est pas la mienne ni celle de nombre de libristes que je connais. Non Commercial et No Derivative ? C’est quoi, c’est du libre à deux balles ?

    La philosophie du libre, c’est BY, ou BY-SA, pas NC et ND.

    Et impliquer la SACEM dans un projet se prétendant libriste… c’est une blague ou un cauchemar ?

    1. Notre vision du libre est pluraliste. elle inclus aussi les auteurs et artistes qui désirent diffuser leurs œuvres selon les conditions qu’ils trouveront les plus justes avec leur projet artistique. Il ne nous appartient pas d’infléchir des choix qui relèvent clairement de décisions personnelles à ce sujet. Une oeuvre musicale n’est pas un logiciel et le monde de la musique est différent, cela explique que différents points de vue et des pratiques s’expriment. L’association souhaite, qu’au-delà de la simple expression, ils puissent cohabiter ensemble et travailler ensemble.
      L’accord Sacem / CC n’est pas de notre initiative. Malgré nos propositions, rien n’a été pris en compte par ces acteurs qui ont décidé de faire selon leurs propres intérêts. Je ne te cache pas que nous constatons ici que les intérêts de la Sacem, au sens société privée, ont été priorisé au détriment des usages de licences libres. Et c’est bien ce que cet accord dénonce. C’est une blague cauchemardesque quoi… Blague parce que ça ne résout absolument rien pour les artistes enfermés à la Sacem, et cauchemar car cet accord va entraîner des nuées d’incompréhensions entre les CC-BY-NC-SACEM et les CC-BY-NC-NONSACEM.

  4. Salut,

    Rassure-toi, ce n’est pas le cas, les licences 3.0 utilisées sur le site sont les versions internationales, elles ne rentrent pas dans ce cadre là. Nous n’allons donc obliger personne à changer de licence, c’est le libre choix de chaque artiste au final. Nous n’allons juste pas proposer les licences 3.0 FR.

    Librement,
    Aisyk.

  5. Vous allez supprimer tous les disques publiés sous licence CC 3 ?
    J’ai du mal à vous suivre. Je soutiens votre constat, mais vous en prendre aux artistes comme nous n’aidera personne…

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