Archives de catégorie : Le mouvement du libre

Belle rentrée 2019 sur dogmazic

Vos œuvres sous licences libres sont les bienvenues,
et vous aussi. La navigation sur le site a été améliorée.
Alors, profitez-en, et faites nous découvrir votre univers.
Dogmazic est ouvert à tous les artistes « militants ou non »,
et utilisateurs de licences libres
( qui ne sont pas libres de droits , comme on peut le lire partout sur le web ).

Un petit explicatif de ce que vous pouvez faire avec une licence libre :

https://frama.link/libre-framasoft

Les chantiers en cours sur Dogmazic :

La Radio fait son « grand » retour sur Dogmazic, avec quelques petits soucis côté serveur, mais @luciolebrillante s’y attelle avec ses petites mains. La page d’accueil aussi, a subi des améliorations. En comptant en fournir d’autres. Quelques lenteurs sont perceptibles dû au codage de la page d’accueil, et de celle d’Ampache (le logiciel multimédia, qui permet la lecture et le stockage de l’archive).

Les améliorations à apporter et en cours de la page d’accueil (forum)

La discussion concernant la radio (forum)

Belle rentrée musicale à tous sur Dogmazic !

Tolérance zéro – Miss Hélium – Musique libre en copyleft

P’tite pub gratuite

D’temps en temps, faire dans l’binaire (textes, musiques, insultes…) a le mérite de débloquer vos synapses maltraités par un ministre qui vous pourrit l’intérieur. Suite à cette pratique honteuse mais véritable remède de choc, vous pourrez vous replonger dans l’écoute de l’interprétation magistrale des Variations Goldberg de Bach par Glen Gould.

Miss Hélium sévit autant dans les caves punk que dans les freeparties, soirées diverses (rock, techno, métal, industriel) parfois militantes, manifestations de rue (anti-G8-Bush-LEN…), festivals… Près de 200 concerts dont une centaine en France, mais aussi en Suisse, Belgique, Hollande, Allemagne, Pologne…

S’inscrivant dans le mouvement des arts et des logiciels libres, Miss Hélium se refuse de devenir membre de la Sacem. Sa musique est sous licence musique libre, cela signifie que l’intégralité des morceaux sont téléchargeables gratuitement sur internet.

Liens
- Tolérance zéro
(tube emblématique des années Sarkozy…)
- https://rocbo.lautre.net/spip/spip.php?article286

Et bien, parlons-en !

Par Julian Angel.

1. Pourquoi tu t’es inscrit à la SACEM ?

J’ai fait la même erreur naïve que pas mal d’artistes, en croyant que l’inscription à la Sacem était quasi indispensable avant de commencer à faire connaître ma musique. A l’époque, je m’inquiétais surtout de protéger mes morceaux, vu les nouveaux moyens de diffusion liés à Internet, mais c’est un raisonnement tronqué : la Sacem est avant tout là pour gérer les droits d’auteur, il y a d’autres moyens de protéger sa musique. Cette confusion reste néanmoins omniprésente dès qu’on parle de la Sacem, et je pense qu’elle est manifestement entretenue ; l’idée qu’ « il n’y a pas le choix » pousse beaucoup de gens à s’inscrire à l’aveuglette. Franchement, je n’étais pas très emballé en parcourant le règlement de la Sacem avant mon inscription, beaucoup de points me dérangeaient déjà, mais j’imaginais qu’il n’y avait pas vraiment d’alternative, faute d’information.

2. Es-tu satisfait des services fournis par cette société ?

Non, clairement non. La Sacem ne m’a servi à rien depuis que j’y suis inscrit, tandis qu’elle a bien profité de mes 700 francs de frais d’ entrée… Peut-être qu’en donnant un concert par semaine, je commencerais à voir l’intérêt d’être sociétaire et pourrais juger plus concrètement de son efficacité, mais ça n’efface pas le reste.

3. Quels sont les bénéfices que tu as tirés de cette inscription ?

Mes morceaux sont «protégés». Mais encore une fois, j’aurais pu les protéger autrement.

4. Quelles ont été tes déceptions par rapport à tes attentes?

Outre le mode de rétribution des droits d’auteur (dont parle la question suivante), je suis vraiment atterré par le manque de communication de la Sacem vis-à-vis de ses sociétaires, pour ne pas dire son mépris : depuis mon inscription en 2000, je n’ai pas reçu le moindre courrier officiel, bulletin d’information, invitation à l’assemblée générale annuelle, rien… Pour un organisme de cette ampleur, à l’énorme capital financier, c’est tout bonnement affligeant.

5. Que penses-tu du système de répartition des sommes collectées au titre du droit d’auteur ?

Il est approximatif et inéquitable, même si apparemment, c’est déjà moins pire que dans d’autres pays. Par exemple, la Sacem reste incapable de véritablement gérer les droits d’auteurs liés à Internet, elle se contente souvent de prélever un forfait aux différents sites hébergeurs de musique «online», mais renonce à le répartir, vu la nébulosité de la tâche. Que devient cet argent ? Il grossit le capital de la Sacem et permet de payer les droits d’auteurs des Goldman, Obispo, je suppose…

Au niveau des radios, c’est le même problème, j’ai déjà été diffusé sur plusieurs radios locales, mais je ne touche rien là-dessus. Non que le manque à gagner soit important, soyons honnêtes, mais pour moi la Sacem favorise elle aussi le phénomène de concentration musicale, de diminution de l’offre, engendré par les majors.

De plus, il y a de la part de cet organisme une méconnaissance évidente des modes de fonctionnement alternatifs, comme les micro-labels ou l’auto-production, notamment sur la question financière. Exemple : si je veux tirer 100 copies d’un disque que j’auto-produis, je vais devoir avancer moi-même les frais liés aux droits de reproduction mécanique, une somme que je ne récupérerai pas intégralement ensuite après versement de mes droits d’auteur, puisque la Sacem en garde 20% dans sa poche. Autrement dit, dans ce cas de figure, je paye pour reproduire ma propre musique…

6. Penses-tu que le fonctionnement de la Sacem soit adapté aux nouvelles possibilités de diffusion de la musique offerte par la technologie numérique ? Leurs prises de position sur le respect des droits de l’auteur, leur vocation à défendre les créateurs et les artistes te semblent-elles justifiées ?

Comme la Sacem a toujours un temps de retard sur l’évolution technologique (en 2001, il fallait encore déposer des partitions pour protéger ses morceaux…), elle voudrait se rattraper en étant à la pointe de la répression contre l’échange «illégal» de fichiers musicaux par Internet… Pour ça, oui, elle semble vouloir être efficace… Mais qui va profiter de son zèle à signer de jolis accords anti-piraterie ? Certainement pas les artistes qui comptent justement sur Internet et le partage de fichiers comme un autre moyen de promouvoir leur musique, peu soucieux de toucher d’éventuels droits d’auteur (je rappelle que 60 % d’inscrits à la Sacem n’en perçoivent pas…).

La Sacem développe les mêmes réflexes paranoïaques et sécuritaires qu’une grande entreprise, protégeant d’abord les intérêts de ses plus gros actionnaires. Comme le ferait une major… Mais elle bénéficie d’un étrange statut de monopole, proche d’une entreprise publique. C’est encore une autre aberration : il serait logique d’avoir le choix entre plusieurs sociétés de gestion des droits d’auteur en France, comme on a le choix entre plusieurs assurances, plusieurs banques, etc. C’est un peu comme si la Sacem cumulait les privilèges d’une entreprise d’état avec les avantages d’une entreprise privée…

Sinon, il paraît effectivement que la Sacem aide au développement des jeunes artistes, mais je ne crois pas que je rentrerais dans les critères requis…

7. « vivre de sa musique » : est-ce un objectif pour toi ? L’inscription à la Sacem entre-t-elle dans ce projet ? Que conseillerais-tu aux artistes désireux de vivre de leur musique ?

C’est un objectif un peu flou. Disons que je ne désespère pas de gagner un jour un peu d’argent régulièrement grâce à ma musique, peut-être par le biais des droits d’auteur, oui, même si ce n’était pas ma première préoccupation en m’inscrivant à la Sacem. Disons que je préférerais avoir un revenu en vendant mes disques, plutôt qu’en touchant des droits pendant 20 ans sur un seul morceau devenu un tube, ce qui est le lot de pas mal de musiciens ayant eu leur heure de gloire… Cela dit, ce cas de figure ne me choque pas, je n’ai rien contre le fait d’être rémunéré quand d’autres exploitent commercialement votre œuvre, d’une manière ou d’une autre. Je ne m’oppose pas au principe du droit d’auteur, et je ne le jugerai pas ici, je déplore juste la manière dans la Sacem le gère.

Que conseiller pour vivre de sa musique ? Écrire des chansons en français et devenir intermittent du spectacle… ça me semble la moins pire des solutions en France. En l’occurrence, ce n’est pas celle que j’ai choisie. Concrètement, s’inscrire à la Sacem peut devenir utile et avantageux si on connaît déjà un certain début de notoriété, et qu’on donne régulièrement des concerts, autrement, il vaut mieux éviter.

8. Connais-tu les licences libres ? Quels sont pour toi les intérêts d’opter pour cette solution et les inconvénients ? Si tu pouvais quitter la Sacem, envisagerais-tu d’adopter une telle licence ?

Oui, j’ai étudié la question des licences libres, c’est un sujet passionnant, prometteur. En fait, pour moi l’idéal serait d’avoir la liberté, œuvre par œuvre, quant au choix d’une licence ou non, d’une inscription à une société de gestion des droits d’auteur ou non. J’aimerais bien mettre certains titres sous une licence libre, mais on est supposé déposer toutes ses œuvres à la Sacem en tant que sociétaire. Encore une exigence abusive et très mal justifiée. Si je n’étais plus à la Sacem, oui je ferais sûrement le choix d’une licence libre, mais probablement au cas par cas.

9. Après la redevance sur les supports numériques, certains envisagent de créer une autre redevance portant sur la circulation des fichiers numériques. Qu’en penses-tu ?

Ce sera toujours le même problème, savoir à qui profite la taxe… Quand j’achète un paquet de CD vierges en France, je paye du coup aussi la taxe sur les supports numériques, celle-là même qui est supposée, notamment, apporter une compensation financière aux auteurs-compositeurs comme moi. Bref théoriquement, je paye pour me venir en aide, mais la Sacem ne me reverse rien. Curieux système…

10. Les arrestations d’utilisateurs de réseau P2P et d’une manière générale la manière dont une partie de l’industrie du disque, relayée par une partie de la classe politique et des institutions, prennent à parti ces utilisateurs, te font-elles réagir ?

C’est tout bonnement surréaliste… Perquisitions, parfois une famille entière au poste, des gardes à vue, et jusqu’à 3 ans de prison ferme, paraît-il… La charte qui a été signée en juillet dernier entre les principaux acteurs de l’industrie musicale, la Sacem et l’état, montre comment des intérêts économiques supérieurs peuvent aisément asservir la loi française. Ainsi, ce texte exige ouvertement des fournisseurs d’accès qu’ils fassent davantage la promotion des plate-formes légales de musique sur internet, autrement dit celles des majors… Et ces gens donnent ensuite des leçons de morale aux internautes…

Le pire dans cette attitude du tout-répressif est qu’elle vient radicaliser un débat qui a besoin de rester ouvert, objectif. La question de l’impact du peer2peer sur les ventes de disques n’est pas anodine, il ne s’agit pas de nier le sujet, mais de l’exposer le plus honnêtement possible. Or à l’heure actuelle, le lien entre échange illégal de fichiers et baisse des ventes du disque reste difficile à quantifier. Et en tout cas, ses premières victimes n’en sont pas les majors, mais davantage les labels indépendants, plus vulnérables financièrement.
Au fond, c’est l’intérêt d’une minorité d’artistes qui écrase le marché, contre l’intérêt de beaucoup d’autres, un intérêt industriel contre un intérêt culturel. Par ailleurs, le terme de piraterie représente en lui-même une terrible escroquerie médiatique, on ne «pirate» rien en échangeant des fichiers, comme on échangeait avant des CD’s, K7’s, ou vinyles. Il faudrait responsabiliser les internautes différemment, pour un téléchargement «intelligent» en quelque sorte.

11. Quelle serait ta réaction si tu trouvais dans une des situations suivantes ?

a : tu arrives dans une soirée et on diffuse un de tes disques, mais c’est juste une copie gravée du disque original.

D’abord, si j’arrive dans une soirée et qu’on diffuse un de mes albums, c’est signe que les choses tournent plutôt bien pour moi… Donc, je me vois mal me plaindre, tant mieux si la musique est diffusée. Je me contenterai de rappeler qu’on peut aussi acheter le disque original à l’occasion…

b : tu découvres que tes morceaux circulent sur un réseau P2P.

C’est probablement déjà le cas et ça ne me gêne pas du tout dans ma position actuelle. L’opération est plutôt bénéfique, je me soucie peu des droits d’auteurs perdus que la Sacem ne me reverserait de toute façon pas.

c : un type reprend une de tes chansons sur scène (tout en ayant soin de signaler que c’est une reprise et que tu en es l’auteur)

Tant mieux, c’est flatteur en soi. Maintenant tout dépend du chanteur en question, je ne voudrais pas voir certaines personnes reprendre mes morceaux (d’ailleurs elles ne le voudraient sûrement pas non plus, donc peu importe…)

d : un site web propose un de tes morceaux en téléchargement libre (tout en renvoyant à ton propre site)

Si c’est fait sans me demander mon autorisation, sans m’avertir, je risque d’être un peu contrarié… Sinon, ça dépend du contenu du site.

Un artiste de variété peut-il être vraiment indépendant ?

Par Patrick Destrem, décembre 1999.

Je vous livre ici quelques réflexions qui m’ont conduit à rejeter ce qui semble être, pour une large majorité d’auteurs compositeurs, une démarche logique et incontournable : devenir sociétaire de la SACEM. Peut-être vais-je m’attirer quelques inimitiés, mais dans le cadre d’une rubrique baptisée “expression libre”, sur un site baptisé “le portail de l’art indépendant”, le sujet m’a paru parfaitement à sa place. Sans grand espoir de créer un large consensus, j’espère au moins susciter le débat… Chacun peut constater que ce qu’il est coutume d’appeler la variété fait aujourd’hui vivre (très bien) un petit nombre de personnes (ceux qui remplissent les salles prestigieuses, cartonnent à la vente et ceux qui les produisent), et qu’elle laisse sur le bord du chemin le plus grand nombre (les artistes qui doivent se contenter d’un statut d’intermittent du spectacle, d’ailleurs aujourd’hui menacé). Quand, dans le même temps, on constate que ce qui “marche” est comme les vieilles chaussettes, surtout fait de reprises, et que le talent n’est pas forcément proportionnel à la taille du compte en banque des intéressés, on est en droit de se demander où sont aujourd’hui l’audace, la création, l’innovation, la prise de risque, l’authenticité, la liberté de création qui avaient élevé au rang de huitième art ce qui n’est presque plus aujourd’hui qu’un “business” sordide. On peut citer un grand nombre de gens, tels les Gilbert Laffaille, Ricet Barrier, et autres Yvan Dautin qui, bien que jadis reconnus par leurs pairs (par exemple l’académie Charles Cros), doivent aujourd’hui se contenter de petites salles et de galères, quand ils n’ont pas jeté l’éponge… On est aussi en droit de se demander quelles auraient été les chances de carrière d’un Brel, d’un Ferré ou d’un Brassens s’ils étaient nés dans les années 70. (1)

“Indépendant” devrait vouloir dire libre. Libre de rejeter ce système qui ne permet pas à des gens de talent de vivre de leur métier. Libre de créer et diffuser comme on le souhaite. Pourtant, en rejoignant la SACEM, le sociétaire cède la gestion des droits sur son travail à la société (2). N’est-ce déjà pas une perte d’indépendance? Quand on sait que, dans le même temps, il s’engage à déposer toutes ses créations, et qu’au moment même où il crée, les droits sur son travail appartiennent déjà, de fait, à la société (3), est-il encore vraiment indépendant ? Quand on sait de plus qu’un sociétaire voulant s’auto-produire doit avancer un pourcentage du prix de vente de la totalité des disques à la société pour obtenir le droit de pressage (4), n’a-t-il pas déjà perdu une part de sa liberté de création? Je pourrais, multiplier les exemples, mais il me semble qu’une lecture attentive des statuts suffit à se persuader qu’on ne peut être vraiment indépendant en étant sociétaire. Le système SACEM, outre les ombres qui pèsent sur sa gestion passée et présente, est à mes yeux coupable de favoriser l’optique “show-bizz” du profit immédiat, plutôt que d’essayer d’encourager l’émergence de nouveaux talents, comme on serait en droit de l’attendre d’une société qui a la caution du ministère de la culture. Il y a une différence essentielle entre, un “peintre indépendant” qui peut très bien vivre de son travail tout en restant en marge du marché de l’art, et une majorité d’artistes de variété qui n’ont d’indépendant que le fait de ne pas être encore tombés dans les mains d’un producteur ou d’une maison de disque, et qui ont, de par leur appartenance à la SACEM, déjà vendu une part de leur liberté de création à un système qu’ils dénoncent par ailleurs. (5) . En matière de variété, nous sommes dans une logique industrielle ou chaque produit lancé sur le marché a fait l’objet de savantes études d’impact et bénéficie du matraquage bien huilé de tous les médias. Dans ce système, il n’y a guère de place pour un “petit artisanat”. Et pourtant, il y a un espoir : Grâce aux progrès techniques, un musicien peut désormais créer, chez lui, comme un peintre, sans contraintes de temps, sans contraintes commerciales, en toute liberté… Il peut, grâce à Internet, et des sites comme Wikzik, se faire connaître, entrer en contact avec des organisateurs de spectacles, vendre ses disques.

Malheureusement, il faut bien reconnaître que l’on a pas encore vraiment dépassé le stade théorique, et que pour le moment ma vision “artisanale” de la variété n’est viable que parce qu’elle n’est confrontée à aucune nécessité alimentaire. On peut néanmoins rêver, et espérer qu’un jour, parallèlement à la logique “show-bizz”, il y ait une place pour de petits artisans indépendants.

Patrick Destrem, auteur, compositeur, interprète et producteur amateur indépendant – décembre 1999 http://perso.libertysurf.fr/patrick.destrem



(1) Je vois d’ici venir un tas d’objections à mes propos, du genre “mais les goûts du public ont changé”… C’est vrai, mais la raison ne serait-elle pas aussi: “nourri au granulé, le dindon oublie le goût du maïs” ?

(2) Qui peut interdire leur diffusion sur Internet, par exemple. Cela est indiqué clairement dans “vos obligations vis à vis de la Sacem” (suivre le lien ci-dessous pour consulter le texte sur le site de la Sacem).

(3) Pour plus de détails, voir http://www.sacem.fr/societaires/membres.html#cond11 En résumé, en tant que sociétaire, vous ne pouvez “offrir” une musique ou un arrangement à un ami sans renoncer à vos droits moraux (ne pas le signer).

(4) Voir les détails sur site de la SDRM http://www.sacem.fr/percevoir/sdrm/prod5.html En résumé, et sous réserve que ma lecture du texte soit bonne : à moins que la totalité du répertoire reproduit soit dans le domaine public ou de “propriétaire actuellement inconnu” (cas des non-sociétaires), il faudra acquitter les droits correspondant à 7,4% du prix de vente de la totalité des disques destinés à la vente. Même si vous n’êtes pas sociétaire, une seule musique ou arrangement signé d’un sociétaire et vous devrez vous acquitter des droits minimums. Une autre entrave à la liberté de diffusion consiste dans la limitation du nombre de titres déposés sur un support (20 pour CD LP). Il est à noter que toutes les boites de pressage françaises ont obligation d’exiger de vous la déclaration à la SDRM, et qu’ils risquent de gros ennuis en passant outre. La boucle est bouclée et le système bien verrouillé. On est aussi en droit de se demander comment sont reversés les fonds “avancés” par le jeune auto produit… pas en intégralité, ça c’est sûr ! (voir, les articles de presse, cités en bas de page, sur la gestion pour le moins controversée de la Sacem)

(5) Attention, mon propos n’est pas ici de critiquer les collègues indépendants sociétaires, mais de mettre en exergue, pour ceux qui seraient tentés, que le fait qu’adhérer à la SACEM n’est pas une décision sans conséquence… Personnellement, j’ai fait le choix de rejeter en bloc ce système corporatiste archaïque qui profite surtout à ceux qui n’en ont pas besoin et pénalise la création, la production et la diffusion de la musique… Je réalise que la motivation principale de nombreux sociétaires, dont le travail est peu générateur de droits, est la protection de leur travail face à la contrefaçon, la copie pirate et l’utilisation non rémunérée d’un travail, mais le rôle de la SACEM est d’abord de percevoir et de répartir les droits, la protection des œuvres étant du ressort de la “propriété intellectuelle” ou “droit moral” qui lui est garanti par la loi, que l’on soit ou non sociétaire… voir http://www.sacem.fr/societaires/membres.html



Lectures intéressantes sur la SACEM et le droit d’auteur:

Pour avoir décortiqué plus de 200 pages où le mot SACEM apparaît, je suis en mesure d’affirmer que les “sons de cloches” dissonants ne sont pas nombreux! J’en ai quand même trouvé quelques-uns : ils concernent la spoliation des droits des auteurs juifs pendant la guerre, la gestion pour le moins controversée de la Sacem, l’ambiguïté du statut de la Sacem, société de droits privé, jouissant de pouvoirs dignes d’une administration et le peu de cas qui est fait d’une des missions de la Sacem, à savoir l’aide à la création pour les auteurs et compositeurs n’ayant pas encore atteint le stade de la notoriété.

Paru dans l’Express :

http://www.lexpress.fr/editorial/zooms/sacem/ouverture.htm

Sur le même sujet :

http://www.timbale.com

http://w3.caissedesdepots.fr/cdd/fr/f/actualite/faits_detail_350.htm

A propos de la gestion de la SACEM :

http://www.esc-brest.fr/cg/cgrp20F.htm

http://www.grolier.fr/cyberlexnet/COM/A981214.htm (un peu ardu, mais très bien argumenté)

Le code français annoté de la propriété intellectuelle : http://nteserveur.insa-lyon.fr/liens/droits02.htm

Comment j’ai libéré ma musique : l’histoire d’une conversion

Le 8 février 2006 par caphar

Ça y est, c’est fait. Ça vient de se passer, et ça fait du bien. Il y a eu une bascule, subite, inattendue, dans ma façon de concevoir ma musique. Tout était en place, depuis longtemps, mais c’est seulement aujourd’hui que j’ai franchi le pas. Ma musique est devenue libre…

Ça y est, c’est fait. Ça vient de se passer, et ça fait du bien. Il y a eu une bascule, subite, inattendue, dans ma façon de concevoir ma musique. Tout était en place, depuis longtemps, mais c’est seulement aujourd’hui que j’ai franchi le pas. Ma musique est devenue libre…

Si je conte cette affaire, c’est parce qu’elle illustre un phénomène majeur en cours. Je ne prétends pas être exemplaire, mais mon cas me paraît symptomatique d’un changement à plus vaste échelle. Un changement d’état d’esprit. Il y a potentiellement un raz-de-marée de libération de la musique.

I wanna be a star

L’histoire commence comme beaucoup d’autres, il y a deux demi-douzaines d’années, quand le Caphar, alors turgescent pré-adolescent nourri de mélopées Jarresques et de kling-klangs teutons, se croit capable de produire sa propre musique pour rejoindre ses idoles au Panthéon électronique. C’est le parcours classique du home studiste un peu renfermé. Il s’achète un beau synthé, compose d’atroces imitations sans saveur, trouve quelques camarades avant de les quitter devant l’inanité de leur collaboration (en plus un groupe avec quatre claviers, c’est ridicule).

Assez vite, il a l’intuition d’un succès considérable. Tel le Henry qui voudrait bien réussir sa vie, il peuple ses nuits de concerts fantasmés, de monnaie ronflante, de disques d’or enchaînés et de groupies déchaînées. Pendant ce temps il compose, il s’améliore. Passant au fil des influences de la jungle, de la techno, de Björk ou du rock gothique, sa musique se colore, se diversifie, s’enrichit de nouvelles saveurs. Ses copains l’encouragent, l’orientent, critiquent. Sa musique est bizarre, mutante, monstrueuse. Mélange de styles sans doute maladroit, mais c’est ce qui plaît à ses quelques auditeurs.

Inévitablement, tant d’émulation lui fait pousser des ailes. N’ayant pas oublié ses rêves de gloire, il tente de se plier au format standardisé pour espérer percer dans le monde de la musique : douze chansons, collées dans 55 minutes de CD, ça s’appelle un album. Trop ravi d’avoir compilé ses oeuvres, il sonne à la porte des labels techno. Le couperet tombe : votre musique n’entre pas dans le cadre de nos productions. Alors il sonne à la porte des labels gothiques. Idem. Ça ne rentre pas. Pareil chez les allemands, chez les anglais. It does not fit. Il a beau tailler, arrondir, c’est irrecevable : s’il accepte de fournir le « produit » qu’on lui réclame, il abdique du même coup tout ce qui lui plaît dans la musique. S’il ôte tout ce qui « accroche », ce qui détone dans sa musique, il la vide de toute son âme.

Qu’à cela ne tienne, il se rue sur Internet et les nouvelles promesses de rentabilité d’un petit site qui s’appelle MP3.com. A l’époque, ce site communautaire révolutionnaire permettait aux artistes de vendre leurs albums au prix de quelques morceaux offerts en téléchargement gratuit. L’affaire fera long feu, sans jamais assurer une rétribution à la hauteur des efforts investis : après un an de publicité éhontée et de référencement à tout va, tout juste une quinzaine d’albums vendus.

Tant d’illusions sans jamais de concrétisation devaient mener le home studiste à un enfermement artistique de plusieurs années. Puisque personne ne voulait l’acheter, il ne diffuserait plus. D’ailleurs il avait trouvé un boulot passionnant, une femme pas loin de la perfection, et autres activités chronophages. Mais puisqu’il ressentait le besoin pathologique de produire de la musique, il n’allait pas s’arrêter en si bon chemin. Ainsi donc commença une accumulation de morceaux des heures perdues. Morceaux du soir, morceaux du week-end, les yeux rougis par l’écran. Morceaux finement ciselés, inspirés par la démence et travaillés avec amour, mais finalement dépourvus de tout public en dehors des proches, toujours bienveillants (« ton dernier morceau est vraiment digne de passer sur Nova »).

Et puis il y a eu ces trucs dont il a vaguement entendu parler sans dresser l’oreille : la musique libre, les audioblogs, le Web communautaire, les Creative Commons. Le premier événement a eu lieu fin janvier : « je vais faire un blog », s’était-il exclamé en se rasant le matin (d’où une anodine petite coupure). Parce que :

Je suis super has been si j’ai pas de blog, même les auditeurs de Skyrock et les hommes politiques s’y sont mis depuis longtemps
je pourrai mettre en ligne mes morceaux, ça coûte rien. J’en mettrai un ou deux, juste assez pour me faire connaître, et je garderai le mieux pour le futur label qui acceptera de me rendre riche .

La deuxième étape fut franchie il y a trois jours, à mesure que l’intérêt éveillé par ses quelques compositions lui faisait ressentir au fond du ventre une chatouille qu’il n’avait pas ressentie depuis longtemps. Ces commentaires élogieux, ces critiques pertinentes, cette impression que quelqu’un avait absorbé sa musique, s’en était imprégné et avait été marqué, voilà ce qu’il avait perdu… L’excitation existentielle de la confrontation à l’autre ; l’échange, le partage, c’était diaboliquement gratifiant.

Alors j’ai ouvert les yeux

J’ai ouvert les yeux sur une évidence que je m’étais refusé à admettre : je ne serai jamais une star de la musique. Jamais un musicien rentable, de ceux qui « tournent », vivent de leurs ventes. En plus, je ne joue pas ma musique. Incapable d’assurer une scène, je ne créerai jamais assez de « buzz » pour m’assurer la célébrité qui nourrit. Alors quoi ? Faudrait-il tout arrêter ? Enfermer ma musique dans un coffre fort, à l’abri des jaloux, des cupides, de ceux qui voudraient écouter sans payer la dîme ? Non, au contraire. Puisqu’elle ne se vend pas, offrons-la.Il y a deux jours, avec des restes de protectionnisme, j’ai approché cette chose, la musique libre. Un peu inquiet, j’ai demandé aux petits gars du collectif Revolution Sound Records s’il y avait une licence pour « protéger » ma musique, en parlant de dépot à la Sacem, de recherche d’antériorité, de dépôt chez le notaire… Ce Jérôme (Dieu le bénisse), m’a asséné avec l’air de celui qui a vu la lumière en dehors de la caverne : « opte pour les CC, et fait de la zique. La musique c’est fait pour l’échange et le partage à mon avis, pas pour devenir avocat ou banquier ». Bon sang mais c’est bien sûr ! Ce que je cherche, c’est à diffuser, pas à protéger.
Ce matin, j’ai adopté pour de bon la licence Creative Commons et j’ai un sentiment de liberté incommensurable. Enfin j’ai abandonné cette vieille résistance qui m’interdisait de partager ma musique, ou alors avec des arrière-pensées. Je vais enfin pouvoir communiquer, donner, frustrer, recevoir, donner une vie à mes créations. Il a pris fin ce rêve de gloire entretenu par l’industrie du disque, qui formate non seulement les disques mais les artistes et les esprits. Etre dans les meilleures ventes, est-ce un but sérieux quand on apprécie la créativité et l’inventivité de l’underground ? Il y a plus que ça dans la musique…

Si j’en crois musique-libre.org et consorts, je ne suis qu’une des innombrables gouttes de ce torrent qui veut se déverser. On se doute bien que ça ne va pas abolir les intermédiaires capables de recommander les meilleurs artistes, mais ce qui est frappant c’est que tout ça se déroule dans le dos d’une industrie musicale minée par ses choix et qui se débat avec les arguments légaux pour éviter de se remettre en cause (cf. ce post de Jullian Angel, artiste « libre », qui m’a convaincu).

J’espère à mon tour convaincre d’autres créateurs de « relâcher » leurs productions. N’attendez pas que le marché vous remarque pour vous faire entendre ! Libérez votre musique ! Maintenant !

Source : http://www.lepotlatch.org/2006/02/25-comment-j-ai-libere-ma-musique/

Vers la musique libre – Bordeaux, février 2001

Zikos et amateurs de musique, ce message vous concerne ! Le texte qui va suivre se propose de vous causer d’un projet qui risque fort de révolutionner le marché de la musique, en pleine crise d’identité. Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, il me semble nécessaire de parler de GNU. GNU est ce qu’en France les médias ont coutume d’appeler Linux (il serait plus juste de dire GNU/Linux), c’est-à-dire, un système d’exploitation entièrement libre, des programmes informatiques libres eux aussi, fruit du travail souvent bénévole de nombreux programmeurs à travers le monde.

GNU est régi par une licence très particulière, la GNU General Public License, qui garantit à tous

La liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages (liberté 0).

La liberté d’étudier le fonctionnement du programme, et de l’adapter à vos besoins (liberté 1).

La liberté de redistribuer des copies, donc d’aider son voisin (liberté 2).

La liberté d’améliorer le programme, et de publier vos améliorations pour en faire profiter toute la communauté (liberté 3).

(extrait de la traduction de Karl Pradène d’un texte de Richard Stallman intitulé « Qu’est-ce qu’un logiciel libre ? »)

Il est à noter, comme le précise d’ailleurs M. Stallman dans le même texte, que libre ne veut pas dire gratuit. Il existe des logiciels gratuits qui ne sont pas libres (freeware) à côté de nombreux logiciels et systèmes d’exploitation qui sont non seulement libres mais aussi gratuits (parfois les utilisateurs payent pour leur copie d’un programme informatique libre, parfois, c’est gratuitement qu’ils l’obtiennent). Le logiciel libre constitue une révolution, il circule sans entrave dans un univers pourtant marqué par la recherche du profit : lorsque vous copiez un logiciel Microsoft, même gratuit, et que vous le refilez à un pote, cela s’appelle du piratage et c’est puni par la loi (le copyright n’autorise qu’une copie par personne, aucune modification du produit n’est tolérée).

Richard Stallman, fondateur du projet GNU a trouvé un procédé très astucieux pour diffuser les produits informatiques tout en les les protégeant : le copyleft, ou copyright inversé. Le copyleft donne le droit de faire autant de copies que l’on veut d’un logiciel libre ; la copie devient libre à son tour et acquiert automatiquement le même statut que l’original, etc. Le but d’une telle entreprise étant de permettre à un plus grand nombre d’utilisateurs d’accéder aux produits informatiques en invitant les programmeurs comme les utilisateurs à « partager », « aider son voisin ».

La GPL n’est pas qu’une incitation à la copie et à la modification des logiciels (accès au code source), elle est aussi garante du respect des auteurs de logiciels libres (avant de mettre un logiciel sous copyleft, M. Stallman suggère de le mettre d’abord sous copyright afin de protéger son/ses auteurs), ainsi qu’un appel à un esprit plus communautaire, moins mercantile. A titre d’exemple, une distribution GNU/Linux (il en existe un nombre croissant) coûte rarement plus de 300 FF dans le commerce et vous donne accès à des milliers de logiciels – dont celui que j’utilise pour rédiger cet article. La quasi totalité des éléments du système et des logiciels fournis étant libres et gratuits, vous ne payez en somme que le packaging ; vous pourrez ensuite en faire ce que vous voudrez.

Tout ce préambule était destiné à vous éclairer sur le contexte dans lequel s’élabore actuellement la Free Music Public Licence, héritière musicale en ligne directe de la GNU GPL.

Musicien depuis un certain temps, je me suis toujours demandé quel était le meilleur moyen pour diffuser la musique que je compose. Cela m’embêtait fort d’être obligé de passer par une liste toujours plus longue d’intermédiaires vampiriques, ou muets, et lorsque je me suis par hasard intéressé au projet GNU, ça a tout de suite fait tilt : « Pourquoi pas une licence du même type pour la musique ? ». J’eus la chance d’échanger quelques mots avec R. Stallman sur ce sujet lors de sa venue à Bordeaux l’été dernier, pour les rencontres mondiales du logiciel libre. Il m’indiqua l’e-mail d’un étudiant de l’Université de Berkeley, Ensor avec lequel je me mis tout de suite en contact. Ensor travaille actuellement avec l’aide d’un avocat, Me Lawrence Lessig à l’élaboration du texte de la Free Music Public Licence (FMPL), le texte est aussi en germination avancée chez Ram Samudrala, auteur de nombreux – et fort instructifs – articles sur la philosophie de la musique libre. Il existe déjà quelques sites web qui diffusent de la musique libre, de nombreux musiciens y proposent déjà leur musique (on trouvera en fin d’article les adresses de ces sites).

Lorsque son texte sera juridiquement validé, la FMPL donnera, comme son inspiratrice informatique le droit de copier et de modifier la musique. Elle protégera bien entendu les musiciens contre les entreprises malhonnêtes telles que l’appropriation « commerciale » de leur musique par un tiers qui n’y aurait apporté aucune modification, et/ou aurait arbitrairement apposé son propre copyright sans tenir compte du/des auteurs de celle-ci. Les clauses à respecter impérativement pour diffuser de la musique libre sont de joindre le texte de la licence à la musique (sous forme de fichier informatique présent dans le CD, ou le fichier MP3) et de préciser les nom et contact du/des contributeur(s) (de même, tout logiciel libre est accompagné de la GNU GPL).

Toute entreprise commerciale sera régie par les termes de la FMPL, celle-ci ayant pour but principal de créer une communauté de musiciens solidaires, de stimuler la créativité par l’échange de connaissances dans le respect et la courtoisie, de faire circuler et de protéger la musique en légalisant la reproduction (fini le procès Napster !), d’autoriser la modification (arrangements différents, samples, interprétation différente, remix, ajout de paroles, d’instrumentation différente, reprises, etc.) des œuvres musicales et de supprimer les intermédiaires entre le musicien et le public (vente directe, téléchargements ou CD, possibilité pour le public d’enregistrer les concerts, etc.).

Il y a donc une réponse légale au trafic de copies illicites de CD : la copie licite ou copyleft. Il y a aussi une réponse au tarif exorbitant des CD (moins cher que le vinyle, c’est ce qu’on nous disait dans les années 80, bilan, le CD est à 120FF, pour un coût réel de fabrication se situant largement en dessous de 10FF).

Les musiciens ne touchent que 4% du prix versé par le public pour leurs CD ; de plus, ce barème est variable (les musiciens « connus » reçoivent plus de 4%, les autres, moins de 4%). A l’inégalité des chances entre les musiciens provoquée par l’attitude cynique sans ambiguïté des « géants » du secteur, à l’oubli de tant d’œuvres musicales sous prétexte que celles-ci n’ont pas de potentiel commercial, il y a une réponse : cette réponse, c’est la FMPL. La FMPL sera sans doute terminée – au plan légal – courant 2001. N’hésitez pas à me contacter si vous souhaitez des précisions supplémentaires sur ce sujet épineux, ou si vous souhaitez soutenir notre action, ou encore, si vous avez de bonnes objections à apporter à ce projet qui ne manquera certainement d’en soulever de nombreuses et cruciales pour sa pérennisation.

Toute contribution est bien entendue la bienvenue. J’invite tous ceux que le sort des exclus (volontaires ou non) du show business (et ils sont aussi nombreux que talentueux) intéresse à participer au développement du site. Vous pourrez bientôt y télécharger la musique d’Exorciste de Style, de Loubia Dobb System (deux projets auxquels je travaille), et de tous ceux qui auront envie d’y proposer leur musique. Vous pourrez aussi vous y exprimer sur la question, si elle vous intéresse. Nous ne misons d’emblée que sur l’honnêteté du public, son sens des responsabilités vis-à-vis de la société de consommation, et son respect supposé des créations musicales. Le système actuel et le développement du MP3 a malheureusement enfanté une nouvelle race de consommateur : le consommateur-voleur. Celui-ci aura-t-il un peu plus de scrupules à s’approprier de la musique libre ? Finira-t-il par acheter ma musique, et celle de ceux qui comme moi se sont engouffrés dans cette brèche ? Il la paiera moins cher que celle qu’il ne voulait plus payer, c’est déjà un bon argument. Il saura ensuite qu’elle ne profite pas à un producteur véreux, mais à celui ou ceux qui l’ont fabriquée.

Musiciens : la recherche seule du profit affame la créativité ! Ne sommes-nous pas de plus en plus nombreux à avoir les moyens techniques de produire de la musique de qualité par nous-mêmes ? Alors pourquoi attendre qu’un gugus en costard infroissable bleu électrochoc daigne – peut-être un jour, rien n’est moins sûr d’ailleurs – nous autoriser à pénétrer dans son joli bureau pour y signer le contrat du-siècle-de-la-mort-qui-tue (« Un havane, Serge ? »). Nous pouvons nous passer de lui, n’est-ce pas, amigos ! Pour le moment, un paquet d’entre nous sont obligés de trimer à autre chose qu’à leurs compos pour gagner leur croûte. Musiciens, mélomanes, labels indépendants de France, de Navarre, d’Amérique ou du Lesotho, aidez-nous à libérer la musique de ce système inégal et verrouillé, qui engraisse les uns pour mieux dépouiller les autres : rejoignez le camp de la musique libre !

Wagdi, Eric Aouanès

Témoignages d’artistes

Pourquoi ces témoignages ?

La musique libre – ou plus généralement la libre diffusion des œuvres – est un phénomène qui intrigue, et qui suscite souvent l’incompréhension. Comment peut-on accepter de brader sa musique sans contrepartie ? Les auteurs n’ont-ils aucun respect pour leurs œuvres et pour eux-même ? Dans un monde résolument capitaliste, la musique libre n’est-elle pas une « aberration » ?

Un des meilleurs moyens de dépasser ces incompréhensions, c’est de laisser la parole à ceux qui ont fait le choix de la libre diffusion de leurs œuvres. On se rend alors compte que leur point de vue est parfois bien plus pragmatique et réaliste que l’on ne le supposait… Ce qui, bien entendu, n’exclue pas nécessairement un positionnement idéologique ou philosophique.

Petite liste non exhaustive

Prélude.ch : Musique Libre en prison, 2010-2011

Angil : Pourquoi je ne suis pas à la Sacem ? Février 2008

Julian Angel : Et bien parlons-en… (2006 – en réaction au dossier de la Fnac dans le magazine Epok sur La musique gratuite tue)

Le Caphar : Comment j’ai libéré ma musique : l’histoire d’une conversion (2006)

Lame Spirale : Les invités ou un des rôles de la communauté de la musique en libre diffusion (2003)

REMI (Réseau des Musiciens Indépendants) : Faut-il adhérer à la Sacem ? Novembre 2003 (actualisé en Novembre 2005)

Phillipe Destrem : Un artiste de variété peut-il être vraiment indépendant ? Décembre 1999

 

Qu’est-ce que la musique libre ?

Qu’est-ce que la Musique Libre ?

On appelle Musique Libre l’ensemble de la musique sous licence de libre diffusion, c’est-à-dire l’ensemble des morceaux, compositions et enregistrements pour lesquels les auteurs et interprètes ont accordé au public un droit d’échange, de partage et de rediffusion.

(Extrait de Une histoire de mots : culture libre et libre diffusion)

Concrètement, il s’agit de musiciens, dans tous les genres et styles possibles, qui distribuent leurs œuvres selon les termes de « licences » (licences libres, licences de libre diffusion ou licences ouvertes). Ces licences sont des contrats de diffusion, passés entre le ou les auteurs et l’auditeur. Grâce à ces contrats, le ou les auteurs accordent à l’auditeur un certain nombre de libertés, dont la plus basique est la possibilité de rediffuser l’œuvre sans accord spécifique – entre autres pour en faire une copie pour des amis, ou même pour de parfaits inconnus, via des webradios par exemple – dans un cadre non commercial. Une seule restriction : la nouvelle diffusion doit se faire sous la même licence.

Quel intérêt pour le mélomane ?

  • Le mélomane accède à une base de données de titres légalement et librement disponibles.
  • Le mélomane a la certitude de n’enfreindre aucune loi sur le droit d’auteur.
  • Le mélomane découvre des artistes originaux qui n’auraient pas été lancés par une industrie de plus en plus frileuse.
  • Le mélomane sait qu’une majeure partie (ou la totalité) des recettes est destinée à l’artiste.
Attention : La musique libre n’est en aucun cas de la musique « libre de droits », car les auteurs de musique libre conservent certains droits (notamment moral) et en accordent d’autres au public, diffuseurs, etc., et cela qu’elle que soit leur licence ouverte.

Pour en savoir plus

Référez-vous à notre Guide de la Musique Libre.

Une histoire de mots : culture libre et libre diffusion

Qu’est-ce que la musique libre ?

Petite définition pragmatique :

On appelle Musique Libre l’ensemble de la musique sous licence de libre diffusion, c’est à dire l’ensemble des morceaux, compositions et enregistrements pour lesquels les auteurs et interprètes ont accordé au public un droit d’échange, de partage et de rediffusion.

Fiche d’identité

Auteur : Florent Verschelde
Date : 19 mai 2006
Adresse de référence : http://www.covertprestige.info/la-libre-diffusion

Texte intégral

En septembre 2005, Dana Hilliot proposait dans la Tribune Libre de Framasoft un article intitulé « Bref éloge de la licence Creative Commons nc nd ». Il y vantait l’utilité d’une licence – c’est à dire d’un contrat-type – massivement utilisée par nombre d’artistes pour favoriser la diffusion de leurs œuvres, tout en conservant la majeure partie de leurs prérogatives d’auteur.

Cet article, ailleurs que sur Framasoft, serait sans doute passé plus ou moins inaperçu. Mais sur ce site communautaire dédié aux logiciels libres et au monde du libre en général, il fut très rapidement l’objet d’une controverse : une œuvre diffusée sous une licence somme toute assez restrictive pouvait-elle être qualifiée de « libre » ? Ne s’agissait-il pas plutôt d’une manœuvre de la part de certains artistes, visant à profiter de la connotation positive associée au libre ?

J’avais à l’époque esquissé une réponse et, si vous me le permettez, j’aimerais la reprendre ici.

La Creative Commons BY-NC-ND n’est pas une licence libre

Ce n’est un secret pour personne : les licences de type Creative Commons s’inspirent directement des licences libres utilisées pour la diffusion des logiciels libres 1). Peut-on pour autant parler de « licences libres pour les œuvres non logicielles » ? On peut en douter.

La définition du logiciel libre, inspirée par les réflexions de Richard Stallman, est donnée par la Free Software Foundation. Cette définition est très stricte, et on considère généralement qu’un logiciel ne peut être qualifié comme « libre » que s’il remplit certaines conditions. Par exemple, la licence libre qui définit les conditions d’utilisation du logiciel doit garantir le droit de rediffusion, que cette rediffusion soit commerciale ou non.

À l’inverse, les « licences libres » créées pour des œuvres littéraires ou artistiques, ou plus généralement pour toutes les œuvres de l’esprit à l’exception du logiciel, sont beaucoup plus souples. Certaines licences utilisées pour diffuser des œuvres de l’esprit, comme par exemple les licences Creative Commons comportant une clause NC (usages commerciaux interdits), ne répondent pas aux critères caractéristiques du logiciel libre. Certaines, comme la licence Creative Commons BY-NC-ND, sont même très restrictives 2), et ne permettent qu’une diffusion non commerciale sans accord spécifique et ponctuel de l’auteur. Techniquement parlant, la licence Creative Commons BY-NC-ND n’est donc pas une licence libre.

Dans ces conditions, parler de « licence libre » pour ces licences Creative Commons est perçu comme un abus de langage. Voire même comme une manœuvre cynique de récupération : « Regardez, ma musique est libre ! Écoutez-la, partagez-la, rendez-moi célèbre dans toute la communauté du logiciel libre ! »

L’adjectif « libre » est-il librement utilisable ?

Les défenseurs du logiciel libre ont peut-être raison lorsqu’ils luttent contre ces amalgames, quelles qu’en soient les motivations. 3) Par contre, ils oublient quelque chose d’essentiel : ils n’ont pas le monopole de l’adjectif libre.

Pour rappel, avant d’être massivement utilisé pour traduire en français la notion de « free software », cet adjectif faisait déjà partie intégrante de la langue française, et disposait d’un ensemble de significations propres, faisant parfois l’objet de débats philosophiques acharnés. La notion de logiciel libre est venue rajouter une signification à l’ensemble de celles qui existaient auparavant, une signification codifiée de manière stricte et précise.

Qu’en est-il des autres œuvres de l’esprit ? Si l’on parle de « musique libre » ou de « culture libre », que fait-on exactement ? On ne tente pas une récupération cynique des valeurs du logiciel libre ! Au contraire, en s’inspirant parfois de ces valeurs, et en s’en éloignant sur de nombreux points, on construit une nouvelle signification de l’adjectif libre. Il suffit alors, pour éviter les confusions, de définir autant que possible cette nouvelle notion, et de garder à l’esprit que libre comme musique et libre comme logiciel sont deux choses différentes.

Certains craindront malgré tout que des confusions s’installent. Bien sûr, on ne peut pas éviter que, ponctuellement, certains amalgames soient faits. Mais condamner à l’avance toute utilisation de l’adjectif libre dans le domaine de la diffusion des œuvres de l’esprit pour protéger la notion de logiciel libre, ce serait faire bien peu de cas des capacités humaines à jongler avec les subtilités linguistiques ! Ce serait oublier que l’on apprend aux enfants, dès les grandes classes de l’école primaire, que le sens des mots n’est pas monolithique, et qu’un même mot peut accepter plusieurs sens.

Pour ma part, je suis convaincu que Logiciel Libre et Culture Libre peuvent coexister sans pour autant se confondre.

Quelle terminologie adopter ?

On pourrait en rester là. Proclamer que Musique Libre et Logiciel Libre peuvent coexister pacifiquement. Pourtant, les artistes publiant leurs œuvres sous licences de type Creative Commons auraient beaucoup à gagner en marquant plus clairement la distinction entre œuvres culturelles et logiciels. Pour cela, je propose de parler de libre diffusion.

Qu’est-ce que la libre diffusion ? C’est le plus petit dénominateur commun aux six principales licences Creative Commons, à la Licence Art Libre, et aux autres licences que l’on peut maintenant qualifier de licences de libre diffusion. Quelles que soient les permissions accordées à priori par ces licences, ou les restrictions imposées, il reste une constante : l’utilisateur est libre de (re-)diffuser l’œuvre, sans accord spécifique et ponctuel de l’auteur, tant que cette diffusion se passe dans un cadre non commercial.

En utilisant cette définition minimale et pragmatique, on insiste également sur ce qui est sans doute l’essence même de la culture et de la musique libre : l’auteur renonce – en partie – au monopole sur la diffusion que lui accorde le droit d’auteur, et reconnaît au public un droit de partage de la culture et des savoirs.

Choisir les termes « libre diffusion », c’est s’adresser aux non-initiés pour commencer à leur expliquer les spécificités de ce mode de diffusion de la culture.

À l’inverse, les termes « musique libre » ou « culture libre » sont plus opaques pour qui ne s’est jamais penché sur la question. Ils sont par contre plus fédérateurs dans un contexte idéologiquement marqué. Pourquoi alors ne pas combiner l’évocation idéologique et la définition pragmatique ? Voici par exemple ce que pourrait donner une petite définition de la musique libre (dite aussi musique en libre diffusion) :

On appelle Musique Libre l’ensemble de la musique sous licence de libre diffusion, c’est à dire l’ensemble des morceaux, compositions et enregistrements pour lesquels les auteurs et interprètes ont accordé au public un droit d’échange, de partage et de rediffusion.
1) On peut citer la plus utilisée des licences libres, la GNU General Public Licence.
2) Voir le descriptif en français de cette licence. En particulier, la clause ND interdit à l’utilisateur de modifier l’œuvre… on est donc très loin des principes fondateurs du logiciel libre, dont le code source est ouvert et librement modifiable.
3) Des motivations qui sont, bien entendu, beaucoup moins caricaturales que dans l’exemple ci-dessus.